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Dans les coulisses du Louvre1er arrondissement


Le musée du Louvre doit sa réputation mondiale à ses proportions gigantesques et à ses richesses artistiques exceptionnelles. Créé en 1793, il s’est développé progressivement au sein d’un palais dont l’origine remonte à 1202. Pendant près de sept cents ans, rois et empereurs ont résidé au Louvre, étroitement associé au palais des Tuileries à partir du xvie siècle. Ils ont constamment agrandi et embelli ce complexe palatial où cohabitent le pouvoir politique et l’institution artistique jusqu’en 1870. Le Louvre, totalement réaménagé de 1981 à 2012, est devenu un musée à part entière symbolisé aujourd’hui par la pyramide de Pei.



Dominique Leborgne

Le site du Louvre, placé dans le prolongement de la plate-forme insubmersible de Saint-Germain-l’Auxerrois, s’inscrit entre le chemin de halage et la rue Saint-Honoré, doublée au xixe siècle par la rue de Rivoli (1er arrondissement). Les fouilles archéologiques, menées de 1983 à 1989, ont mis au jour des céramiques ornées d’incisions, des os d’animaux, des meules de grès et des outils de pierre qui attestent de la présence de chasseurs-cueilleurs vers 4 200 ans avant J.-C. Les archéologues ont découvert les traces d’une activité rurale entre 1250 et 750 avant J.-C. et d’une exploitation d’argile dans ce lieu-dit appelé Louvre. Ce terme est sans doute un toponyme qui confère son nom au château fort fondé par Philippe Auguste.


La forteresse de Philippe Auguste

Dans le but de défendre Paris contre le danger anglo-normand, Philippe Auguste ordonne en 1190 de dresser une puissante enceinte fortifiée renforcée au bord de la Seine par un château fort. Cette forteresse érigée entre 1190 et 1202, de forme carrée de 80 m de côté, est défendue par dix tours circulaires et entourée de fossés en eau. Au centre de sa cour s’élève le donjon de 15 m de diamètre, de 30 m de haut, baptisé la « Grosse Tour ». On y entrepose le trésor, les archives royales, le garde-meuble et parfois elle sert de prison d’État. Tous les fiefs du royaume relèvent de la Grosse Tour, même après son arasement en 1528.

Dans la crypte archéologique, localisée sous la cour Carrée, subsistent les vestiges spectaculaires de cet ouvrage, notamment le socle du donjon et son fossé. La salle Saint-Louis a sauvegardé ses retombées d’arc rehaussées de têtes grotesques, taillées vers 1230.


La métamorphose du Louvre en résidence royale

Tout un quartier encercle peu à peu le château fort si bien que Charles V fait édifier en 1364 une nouvelle enceinte protectrice, à 300 m à l’ouest du Louvre. Celle-ci englobe le château fort qui, de ce fait, a perdu tout rôle défensif. Le roi commande à l’architecte renommé Raymond du Temple la transformation du donjon. Méfiant, il maintient toutefois les fossés et le pont-levis. Les murs sont alors percés de fenêtres à meneaux, les parties hautes surélevées et enrichies de hautes toitures très ouvragées et de girouettes dorées aux armes de France. La miniature des frères de Limbourg représente ces dispositions originales (1).

Les statues de Charles V et de la reine enjolivent la porte principale. Elles figurent également dans la Grande Vis, un escalier imposant de 20 m qui dessert les appartements. Les salles, aux poutres peintes, chauffées par d’immenses cheminées en pierre sculptée, sont garnies de tapisseries colorées en velours d’Italie ou d’étoffes lamées d’or, parfois lambrissées de bois d’Irlande, de cuir brodé ou gaufré. Des carreaux de terre cuite vernissée armoriés recouvrent les sols. Un somptueux mobilier et des objets, tels que vaisselle d’argent, calice d’or, aiguières de cristal, émaux, reliquaires parachèvent ce cadre raffiné. Passionné par les beaux manuscrits enluminés relatifs à l’astrologie, la médecine, la philosophie, Charles V conserve 917 ouvrages dans la tour de la Librairie. Cette bibliothèque est dispersée lors de la guerre de Cent Ans. Durant ce long conflit, les rois préfèrent vivre sur les rives de la Loire et abandonnent le Louvre pendant cent cinquante ans.


L’amorce de la cour Carrée par Pierre Lescot

François Ier s’établit à Paris en 1528 et déclare que le Louvre sera sa résidence officielle « par commodité ». Il élit l’aile sud du côté de la Seine, désormais bordée d’un quai pavé. À la fin de son règne, il fait raser le donjon afin que Pierre Lescot bâtisse un corps d’hôtel. Tout en s’adaptant au plan carré hérité du château-fort, l’architecte conjugue l’usage traditionnel des hautes fenêtres et des avant-corps, aux ordres antiques et à l’harmonie géométrique.

En 1545, il construit la moitié de l’aile ouest de la cour (côté pyramide), puis sous le règne d’Henri II, la moitié de l’aile sud (côté quai) et le pavillon du Roi (angle sud-ouest). La façade ouest, ponctuée par trois avant-corps, couverte par un comble brisé, impressionne par son décor plastique éblouissant, caractérisé par des moulurations, des incrustations de marbres colorés, des figures musclées et des bas-reliefs sculptés par Jean Goujon. Des allégories de la guerre incarnent les visées impériales du souverain dont le monogramme H est couronné par les Victoires. D’autres figures personnifient le roi bienfaiteur, protecteur des arts et des sciences. Considérée comme un chef-d’œuvre, cette façade sera imitée sur tous les côtés de la cour Carrée.

À l’intérieur du corps de logis perdurent dans leur état originel une salle de réception et l’escalier Henri II. Dans la Salle des Caryatides, des statues drapées délicatement par Jean Goujon soutiennent la tribune des musiciens. À l’opposé, une estrade encadrée par un arc triomphal  – le « tribunal » – surélevait autrefois le trône royal. Aujourd’hui des copies romaines occupent cette salle mémorable. Lescot conçoit les longues volées droites de l’admirable escalier d’honneur dont les voûtes en berceau sont sculptées par l’atelier de Jean Goujon entre 1551 et 1555. Sur les caissons sont ciselés le chiffre d’Henri II, son emblème en croissant de lune et des chiens de chasse (2).

À la fin du xvie siècle, la cour Carrée reste hétérogène : les ailes nord (rue de Rivoli) et est (rue de l’Amiral de Coligny) datent du xive siècle, tandis que l’aile ouest est élevée et l’aile sud (sur le quai) en chantier. La mort accidentelle d’Henri II en 1559 marque un tournant dans l’histoire du Louvre.


Naissance du château des Tuileries

Jugeant le Louvre déplaisant, Catherine de Médicis, veuve d’Henri II, projette une habitation indépendante et plus attrayante. Elle choisit un domaine situé à proximité du Louvre, mais à l’extérieur de l’enceinte de Charles V (3).

Philibert Delorme édifie le château des Tuileries, perpendiculaire à la Seine, dont seul le pavillon central est abouti au décès de la reine, en 1589. Le bâtiment donne sur un jardin à l’italienne composé de parterres de fleurs, de fontaines, d’un labyrinthe et d’une grotte en terre cuite émaillée, imaginée par Bernard Palissy.


Le Grand dessein d’Henri IV

Henri IV, premier souverain Bourbon, entre à Paris en 1594 où il trouve le Louvre dans un piteux état. En 1595, il ambitionne de quadrupler la cour carrée et de réunir les palais du Louvre et des Tuileries par la Galerie du bord de l’eau, d’où il pourra jouir de vues agréables sur la Seine et le port animé. Ce passage de liaison, orienté est-ouest, est relié à la cour Carrée par la « petite galerie » nord-sud.

La Grande Galerie, longue de 450 m, mise en œuvre entre 1595 et 1609, voit sa façade  scindée en deux parties. En effet, la Tour du Bois adossée autrefois à l’enceinte de Charles V constitue un obstacle. Louis Métezeau édifie la section située intramuros, cantonnée par le pavillon des Ambassadeurs. Les chiffres HG (Henri IV, Gabrielle d’Estrées) et HM (Henri IV, Marie de Médicis), des putti, des dauphins, des épis d’abondance en agrémentent la façade. Au-delà de la Tour du Bois, Jacques II Androuet du Cerceau élabore l’autre partie de la galerie, bornée par le pavillon de Flore.

Tandis que le roi se réserve l’étage supérieur de la Galerie du bord de l’eau, le niveau inférieur est monopolisé par des écuries, un atelier de frappe de monnaie, l’imprimerie royale, des logements d’artistes et d’artisans. Les décors intérieurs et la Galerie des Rois commandés par Henri IV ont disparu.

Faute de moyen, Louis XIII suit le programme de son père de façon irrégulière. Jacques Lemercier double l’aile ouest de la Cour Carrée en répliquant l’ordonnance de Lescot. Le pavillon de l’Horloge, coiffé d’un dôme élégant, rehaussé de cariatides sculptées par Jacques Sarrazin, marque la jonction de l’aile ancienne et de la nouvelle. Ce schéma aile-pavillons fournit un prototype aux futurs architectes du palais.


L’impulsion décisive de Louis XIV

En 1652, à la fin des troubles de la Fronde, le jeune Louis XIV et sa mère Anne d’Autriche s’installent au Louvre jusqu’en 1666, puis aux Tuileries jusqu’en 1674. Louis Le Vau modernise leurs appartements : au premier étage du pavillon du Roi, le menuisier Louis Barrois pose les boiseries, tandis que Gilles Guérin sculpte le plafond et l’alcôve de la chambre du roi (4). Au rez-de-chaussée de la petite galerie, Le Vau établit en 1655 les appartements d’été d’Anne d’Autriche – six pièces en enfilade. Les fresques vivement colorées par Giovanni Romanelli, cernées de figures en stucs blanc et or signées Michel Anguier, sont empruntées aux palais baroques romains. Conservées intactes, elles composent un cadre admirable au musée des Antiques en 1800, aux sculptures romaines de nos jours.

En 1663, Le Vau construit la Galerie d’Apollon dans laquelle Charles Le Brun met en scène Louis XIV identifié au dieu solaire. Dans cette salle d’une richesse extraordinaire sont exposés les bijoux de la Couronne, les pierres dures de Louis XIV, des vases en cristal de roche, onyx, lapis-lazuli complétés de montures en or émaillé ou perles (5).

Impatient d’accomplir le Grand dessein, Louis XIV ordonne d’abattre les derniers vestiges médiévaux de la cour Carrée, de façon à élever l’aile est du côté de la rue de l’Amiral de Coligny. Parmi différents projets, celui de Le Vau et Perrault est retenu en 1668. Face à l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, ils édifient la Colonnade : le haut soubassement, rehaussé par trois avant-corps, supporte un péristyle colossal formé de colonnes corinthiennes accouplées. Le Vau achève l’aile Lemercier à l’ouest, poursuit les travaux de maçonnerie sur l’aile nord (rue de Rivoli) et double l’aile sud (côté quai) de la cour carrée. En raison de l’arrêt des travaux en 1678, ces corps de logis demeurent sans fenêtres, ni toits (6).


L’embellissement des Tuileries par Le Vau et Le Nôtre

Le Vau et François d’Orbay restructurent complètement le château pour rajeunir les appartements, mettre les façades au goût du jour en vue de recevoir Louis XIV. Gaspare Vigarani inaugure en 1662 son théâtre – la « salle des Machines » - équipé de dispositifs mécaniques inédits. André Le Nôtre renouvelle le jardin des Tuileries entre 1665 et 1669. L’allée centrale, plantée de marronniers, environnée de bosquets, quinconces et salles de verdure, s’étend sur 300 m. Elle guide le regard vers un bassin octogonal, puis vers la terrasse d’où l’on bénéficie d’un magnifique panorama. Après le départ de Louis XIV à Versailles, le château des Tuileries garde son statut de lieu du pouvoir à Paris. Le souverain y séjourne parfois, le jeune roi Louis XV y habite de 1715 à 1722 et Marie-Antoinette y loge lorsqu’elle se rend au spectacle.


Le centre officiel de la vie artistique

À partir de 1674, le palais du Louvre héberge les courtisans, les artistes de cour et les Académies. L’Académie de peinture et de sculpture, introduite au Louvre en 1692, organise des expositions en 1699 et 1704 dans la Galerie du bord de l’eau afin de montrer ses travaux. En 1725, l’exposition se tient dans le Salon carré, lequel donne son nom à la manifestation. Les œuvres commandées par le roi, les morceaux de réception des académiciens et leurs productions sont commentés par des chroniqueurs enthousiastes, tel que Denis Diderot.

Vu le succès remporté par le Salon, le comte d’Angiviller, ami de Louis XVI et directeur général des bâtiments du roi en 1774, entreprend la préfiguration du Museum des arts dans la Grande Galerie. Il veut associer de façon permanente les collections royales aux ouvrages modernes qu’il encourage par des concours et des pensions. Favorisant l’histoire nationale, il commande aux artistes deux tableaux et quatre statues de marbre d’hommes éminents (Sully, Fénelon, Descartes, à l’occasion de chaque Salon.

Il rassemble les ouvrages dispersés dans les châteaux royaux (1 122 numéros) et dans la galerie du Luxembourg (116 tableaux dont la Vie de Marie de Médicis). Entre 1775 et 1785, il achète la collection Mariette, négocie des œuvres auprès des particuliers, des congrégations religieuses et fréquente les ventes publiques, tant en France qu’à l’étranger. « Garde du Museum », Hubert Robert le seconde habilement dans ses démarches. Avec Soufflot, il dessine plusieurs projets de manière à solutionner les difficultés posées par l’étendue démesurée de la Galerie, son cadre disparate et son éclairage médiocre. Faute d’argent, le projet est ajourné.


Le Muséum central des Arts de la République

Le 6 octobre 1789, Louis XVI et la famille royale sont conduits de force au château des Tuileries où leur emménagement est rondement mené. Le mobilier, la bibliothèque de Louis XVI, son atelier de serrurerie sont transférés de Versailles à Paris. Le roi y est prisonnier  jusqu’au 10 août 1792, date à laquelle les émeutiers assiègent le château des Tuileries. Les députés de la Convention Nationale accaparent la Salle des Machines et cohabitent dans le château avec divers comités dans un désordre total.

Le 10 août 1793, la Convention décrète que la résidence royale du Louvre sera transformée en Muséum central des Arts de la République, de façon à rendre accessible les chefs-d’œuvre de l’art et d’éduquer la population. La Grande Galerie, sommairement aménagée, est inaugurée le 9 novembre 1800. Le public découvre 538 tableaux et des bustes antiques provenant des collections royales, des saisies effectuées sur les biens du Clergé et des nobles émigrés.

Bonaparte se fixe aux Tuileries. Il engage Pierre-François Léonard Fontaine et Charles Percier pour relancer le Grand dessein qui hante toujours les esprits. S’inspirant d’Androuet du Cerceau, Percier et Fontaine entreprennent, le long de la rue de Rivoli, l’aile Marsan qui clôt la cour du Carrousel. L’arc de triomphe du Carrousel, dédié aux campagnes victorieuses des armées impériales, indique l’entrée monumentale du palais des Tuileries fermé par une grille.

En 1800, Bonaparte fait chasser les marchands du Louvre, démolir les baraquements dans les cours, expulser les artistes et supprimer les appartements. En 1805-1810, Percier et Fontaine terminent enfin le gros œuvre de toutes les ailes de la cour Carrée et complètent les décors des façades et des intérieurs, tout en respectant le style de la Renaissance. Ils rythment la Grande Galerie par de jolies arches et des miroirs afin d’en rompre l’étendue et la dotent d’un éclairage zénithal. C’est dans cette galerie lumineuse que défile le cortège nuptial de Napoléon Ier et de Marie-Louise, le 2 avril 1810.


Les palais entre 1815 et 1848

Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe réintègrent le château des Tuileries. Les travaux  continuent sous la houlette de Percier et Fontaine qui, durant quarante ans, régissent le chantier. Fontaine met en scène les antiquités méditerranéennes et égyptiennes dans les huit salles du musée Charles X, inauguré en 1827, au premier étage de l’aile sud de la cour Carrée.Chaque salle, dotée d’armoires vitrées en acajou, de splendides cheminées en marbre et de fioritures en stuc simulant le marbre, comporte un plafond peint en accord avec les objets exposés. L’Apothéose d’Homère, signée Jean-Dominique Ingres, égaie la première salle de ce musée. En 1828, Fontaine agence les neuf salles de la Galerie Campana orientée sur la Seine (7). Félix Duban, qui pare le Salon carré avec opulence, et Louis Tullius Joachim Visconti succèdent à Percier et Fontaine en 1848. Ils restent fidèles au style défini par Lescot et Goujon à la Renaissance. Par manque de crédits le chantier tombe en déshérence.


Le « Nouveau Louvre » de Napoléon III

Élu président de la Deuxième République en 1848, Louis-Napoléon Bonaparte quitte l’Élysée en 1852 pour le palais des Tuileries. En quelques mois Visconti modernise les appartements privés, crée des escaliers d’apparat, des pièces de réception modulables enjolivées de stucs et de peintures de style Louis XIV.

Reprenant à son compte le Grand dessein, Napoléon III souhaite ériger un ensemble administratif  et culturel considérable. Cela implique en priorité la destruction du quartier sordide situé entre le Louvre et les Tuileries. Cette tâche, amorcée par Napoléon Ier, est réalisée en 1853 par Georges-Eugène Haussmann qui en profite pour prolonger la rue de Rivoli jusqu’à la Colonnade de Perrault.

Visconti poursuit la construction de l’aile Marsan (rue de Rivoli) et projette, au nord et au sud de l’actuelle cour Napoléon, deux ailes monumentales augmentées chacune de trois cours. Ces bâtiments, baptisés Richelieu et Denon, masquent ainsi la différence d’axe existant entre les deux palais. Ils ont l’avantage également de dissimuler le dénivelé visible entre la rue de Rivoli et la Seine. Des pavillons, pastichant le pavillon de l’Horloge, scandent le centre et les extrémités de ces longues ailes.Nommé en 1854, Hector Lefuel se conforme à ce plan d’ensemble, mais ajoute sur les façades des ailes Denon et Richelieu une décoration sculptée exubérante inspirée de la Renaissance. De nombreux sculpteurs, tels qu’Auguste Préault, Antoine Louis Barye et Jean-Baptiste Carpeaux, exécutent dans un style éclectique des statues en hommage aux hommes illustres de la nation, des cariatides et des allégories de la nature.

Dans l’aile Richelieu, qui abritait le ministère d’État, les appartements luxueux de Napoléon III ont survécu. Garnis de mobilier, de bronzes de Barbedienne et d’orfèvrerie de Christofle, ils offrent un ensemble rare de style Second Empire.Au rez-de-chaussée de l’aile Denon, Lefuel réserve le manège impérial avec ses chapiteaux à tête d’animaux et la galerie Daru, entièrement minérale, dévolue aux antiquités grecques et romaines dont le Gladiateur Borghèse. Un escalier théâtral conduit au salon Denon couvert d’un plafond surchargé de Charles-Louis Muller. Dans les salles habillées en rouge et or par Alexandre Dominique Denuelle en 1863 prédomine la peinture française autour du Sacre de Napoléon Ier. Au cœur du bâtiment se trouve la salle des États, énorme espace dans lequel La Joconde captive le public actuel.

Alors que ces installations intérieures prennent tournure, l’empereur décide en 1861 d’abattre la partie occidentale de la Galerie du bord de l’eau et le pavillon de Flore tombés en ruine. Lefuel les reconstruit en imitant l’ordonnance de la partie orientale. Au centre de cette façade désormais plus monotone, Lefuel dispose deux pavillons séparés par des guichets qui sont ornés par la statue équestre de Napoléon III. En 1867, Lefuel mène enfin à son terme le Grand dessein initié par Henri IV.


La destruction du palais des Tuileries

La République est proclamée le 4 septembre 1870 à la suite de la défaite de Napoléon III à Sedan. En 1871, les Communards Bergeret, Bénot et Boudin aspergent de goudron, d’essence et de poudre les tentures et les parquets du palais des Tuileries avant d’y mettre le feu. L’incendie embrase le palais durant plusieurs jours. Le conservateur Henry Barbet de Jouy, assisté de gardiens, sauve le Louvre, excepté la bibliothèque réduite en cendres. Du palais des Tuileries, il ne reste qu’une carcasse calcinée. Cependant, entre 1876 et 1879, Lefuel restaure le pavillon de Flore, le pavillon de Marsan, l’aile attenante et espère reconstituer le corps central du palais.

Toutefois, la réhabilitation du palais des Tuileries suscite un débat politique houleux à l’issue duquel la Chambre des députés vote la disparition de ce « signe ostentatoire de la monarchie ». Rasé en 1883, il laisse un immense espace vacant entre les pavillons de Flore et de Marsan. Seul le jardin de 28 hectares, agrémenté d’une centaine de statues et planté de 2 800 arbres, évoque encore ce palais prestigieux (8).


Le « Grand Louvre » au  XXe siècle

En 1926, le directeur Henri Verne regroupe par départements les colletions éparpillées, actualise les salles désormais électrifiées, facilite les circulations par des passages souterrains et organise un point d’accueil dans la salle du Manège. Pendant la guerre de 1939-1945, les œuvres sont convoyées en province par mesure de sécurité. En 1964, André Malraux restitue le fossé prévu au pied de la Colonnade, mais jamais concrétisé.

En 1981, le président François Mitterrand lance le programme de l’Établissement public du Grand Louvre. Les façades noircies sont nettoyées et leur ornements sculptés, rongés par la pollution, remplacés par des copies. Afin d’agrandir et repenser le musée, il exige que le ministère des Finances libère l’aile Richelieu. L’intérieur du bâtiment est démoli, excepté les escaliers et les appartements de Napoléon III. Le président désigne l’architecte Ieoh Ming Pei avec mission de concevoir le recentrement du musée autour de la cour Napoléon.

Pei a l’idée de loger le hall d’accueil dans le sous-sol de la cour. Pour lui fournir de la lumière et signaler son entrée, il imagine une pyramide composée de losanges de verre montés sur une armature de métal. Elle a les mêmes proportions que la grande pyramide de Gizeh, en plus petit. Sa hauteur de 21,65 m, déterminée en fonction de la seconde corniche régnant sur les façades du Louvre, facilite son intégration dans la cour. Ce parti a provoqué de violentes polémiques.

Le hall, recouvert de pierre de Bourgogne par Michel Macary, distribue trois axes de circulation vers les salles du musée, les fossés médiévaux et différents services (auditorium, vestiaire, librairie, restaurants). Ieoh Ming Pei, Stephen Rustow, Michel Macary et Jean-Michel Wilmotte agencent les salles de l’aile Richelieu autour des cours Marly, Puget et Khorsabad, couvertes de verrières. Elles sont inaugurées à l’occasion du bicentenaire du musée du Louvre, en novembre 1993.La pyramide de verre étant décalée par rapport à la perspective historique qui aboutit à l’Arche de la Défense, il est décidé d’indiquer son origine par la statue équestre de Louis XIV. Cette statue en plomb est une copie exécutée en 1988 d’après le marbre de Gian Lorenzo Bernini, déposé au château de Versailles. En 1991-1997, Louis Benech, Pascal Cribier, François Roubaud et Jacques Wirtz pilotent une campagne de travaux dans le jardin des Tuileries tout en maintenant le bassin octogonal et les rampes en fer à cheval, témoignages de l’art de Le Nôtre.

L’aménagement des salles du musée se renouvelle en permanence sous l’œil exercé des conservateurs. À travers 35 000 œuvres exposées, on embrasse l’art des civilisations anciennes remontant à 7 000 ans jusqu’en 1848 (9). Aujourd’hui, environ 500 000 œuvres sont réparties en huit départements.


Les Antiquités grecques, étrusques et romaines

Environ 60 000 œuvres datant du ive millénaire avant J.-C. au vie siècle de notre ère mettent en lumière les arts de la Grèce, de l’Italie et du bassin méditerranéen. Le noyau initial, comprenant les collections de François Ier et de Louis XIV, s’enrichit de la collection Borghèse (500 sculptures romaines) acquise par Napoléon en 1807.

Le fonds se compose de marbres, de pièces archéologiques achetés dans les collections Tochon (1818) et Durand (1825-1836), de céramiques grecques et de bijoux étrusques sélectionnés dans la collection Campana (1861), d’objets originaires de Grèce d’Afrique du Nord et de tout l’Empire ottoman, par exemple La Victoire de Samothrace exhumée en 1863.


Les Antiquités égyptiennes

Un ensemble de 60 000 objets nous renseigne sur l’art, les croyances et la vie quotidienne dans la vallée du Nil, depuis 4 000 ans avant notre ère jusqu’au ive siècle après J.-C. L’intérêt pour la terre des pharaons amène Jean-François Champollion à déchiffrer les hiéroglyphes en 1822. Devenu directeur de la Division égyptienne fondée par Charles X en 1827, il persuade le roi d’acquérir les collections Durand, Salt et Drovetti, soit 9 000 œuvres.

Par la suite, le développement des collections s’avère étroitement lié à celui de l’archéologie française en Égypte et au partage des fouilles. Auguste Mariette découvre le Sérapéum de Saqqara. Entre 1852 et 1853, il envoie au musée 5 964 œuvres, dont le fameux Scribe accroupi.

Des collectionneurs se montrent généreux : le docteur Clot, le comte Tyszkiewicz, le consul Delaporte et Atherton Curtis, légataire de 1 500 pièces au xxe siècle. Depuis 1997, plus de trente salles ont été repensées : les objets lourds et un circuit dédié à des thèmes – agriculture, écriture, vie quotidienne – sont présentés au rez-de-chaussée, tandis que l’étage est orienté vers une approche chronologique.


Les Antiquités orientales

Cette section couvre 9 000 ans, de la Préhistoire au début de l’époque islamique. Les œuvres viennent d’un territoire très étendu allant de la Méditerranée à l’Indus et à l’Asie Centrale ainsi que de la mer Noire (Anatolie) au sud de la péninsule Arabique. La fondation officielle du département en 1881 découle de la recherche archéologique amorcée au xixe siècle par les consuls ou les érudits. Paul‐Émile Botta, consul de France à Mossul, ressuscite l’art assyrien en 1843. En 1860, l’expédition militaire au Levant décidée par Napoléon III se double d’une mission archéologique guidée par Ernest Renan. Ce dernier achemine au Louvre des pièces dénichées à Byblos, Tyr et Sidon. En 1877, Ernest de Sarzec, en poste à Bassora, révèle les Sumériens. En 1884, Marcel Dieulafoy explore Suse où il trouve le Code de Hammurabi. André Parrot en 1933, met au jour Larsa, une ancienne capitale du Pays de Sumer. Différents circuits muséographiques dévoilent les trésors de ce département riche de 100 000 objets.

Les peintures

Pus de 7 000 peintures représentant toutes les écoles européennes, du xiiie siècle à 1848, sont conservées dans ce département – le plus grand du musée. François Ier en est à l’origine. Féru d’art italien, il possède des peintures de Michel-Ange, Raphaël. Il invite à sa cour Rosso, Primatice et Léonard de Vinci auquel il achète La Joconde. Louis XIV se procure la fabuleuse collection du banquier Jabach (101 tableaux), Louis XVI les premières peintures espagnoles (Murillo) et françaises. Au xviie et surtout au xviiie siècles, les écoles du Nord les rejoignent.

Ces peintures forment l’embryon du Museum qui s’accroît avec les œuvres séquestrées aux émigrés et aux religieux, les achats aux particuliers ou aux Salons et les donations Campana (600 tableaux), La Caze (583 peintures), Moreau-Nelaton, Rothschild ou, plus récemment, Lemme, Kauffmann et Schlageter, sans oublier la Société des Amis du Louvre. Deux legs sont indivisibles : les portraits de la collection Carlos de Beistegui et les tableaux hollandais du comte de l’Épine. Conformément à la tradition, les peintures sont accrochées par écoles – française, italienne, espagnole, hollandaise, allemande et anglaise. Dans la Grande Galerie, lieu mythique du musée, les visiteurs déambulent pour admirer les chefs-d’œuvre de la peinture italienne.


Les sculptures

Dans la salle des Caryatides sont entreposés en 1692 les statues royales (Charles V et Jeanne de Bourbon), une série d’hommes illustres destinée au futur Muséum, des morceaux de réception et des dons variés provenant de l’Académie de Peinture et de Sculpture. Le sculpteur Pajou tient l’emploi de « gardien » de 1777 à 1792. À partir de 1793, des bustes d’artistes, des copies d’antiques avoisinent des œuvres saisies aux émigrés comme Les Esclaves de Michel-Ange. Une partie des sculptures (gisants, tombeaux, marbres), sauvegardée du vandalisme révolutionnaire par Alexandre Lenoir, est transférée du musée des Monuments français au Louvre. En 1855, Henry Barbet de Jouy répertorie 388 numéros.

Le département des Sculptures et des Objets d’art est institué en 1871. Le conservateur Louis Courajod acquiert des œuvres romanes, gothiques et de belles pièces de la Renaissance. En 1893 il opère une scission entre les sculptures et les objets d’art. Depuis 1993, les sculptures françaises resplendissent dans la lumière naturelle des cours Puget et Marly, au rez-de-chaussée de l’aile Richelieu. L’aile Denon centralise les collections étrangères.


Les objets d’art

Le département gagne son indépendance en 1893. Cependant, dès de la création du Museum, il est prévu que les objets d’art rangés au Garde-meuble royal, les statuettes en bronze, les pierres dures réunies par Louis XIV, les laques de Marie-Antoinette et les gemmes de la Couronne seront transportés au Louvre. S’y ajoutent des pièces émanant des trésors de la Sainte Chapelle et de l’abbaye de Saint-Denis (les Regalia du sacre des rois de France), ainsi que les saisies révolutionnaires et les acquisitions exceptionnelles comme le Bouclier et le Casque de Charles IX.

La section prospère grâce aux achats des collections d’Edme-Antoine Durand (1825) et du peintre Pierre Révoil (1828), évaluée à 1 300 magnifiques objets du Moyen Âge et de la Renaissance. Le musée recueille le trésor du Saint Esprit (parements brodés, orfèvrerie) en 1830. Il hérite de 1 484 objets du Moyen Âge et de la Renaissance collectionnés par Sauvageot en 1856 et des majoliques de Campana en 1861. À la faveur des versements du Mobilier national, il reçoit des meubles signés Boulle, Riesener, Carlin, des tapisseries des xviie et xviiie siècle, mis en sûreté avant les incendies des Tuileries et de Saint-Cloud déclenchés en 1871. Dons, legs et dations font entrer au musée moult pièces, par exemple des objets de la Renaissance, des bijoux et des porcelaines du xviiie siècle (baronne Salomon de Rothschild, 1922), des objets du xviiie siècle (Isaac de Camondo et Basile de Schlichting), etc. Les objets déposés dans les appartements de Napoléon III et dans la Galerie d’Apollon dépendent de ce département.


Les arts graphiques

Ce département est séparé du département des peintures en 1989. Dessins, pastels, miniatures, estampes, livres, manuscrits, autographes ainsi que bois, cuivres et pierres lithographiques sont conservés dans ce huitième département organisé à la manière d’une bibliothèque. En effet, la fragilité des techniques et la sensibilité des papiers à la lumière nécessitent des précautions relatives à leur durée d’exposition et à la température de la salle. Il comporte trois sections.L’existence du Cabinet des dessins est déterminée par l’achat au célèbre amateur Everhard Jabach de 5 542 dessins par Louis XIV, en 1671. Les peintres Charles Le Brun, Pierre Mignard et Coypel cèdent au roi leurs fonds d’atelier qui sont intégrés dans les collections royales. Les acquisitions à la vente Mariette en 1775 et les innombrables saisies effectuées lors des conquêtes  – comte d’Orsay, Saint-Morys, ducs de Modène – augmentent le fonds. On dénombre aujourd’hui plus de 150 000 dessins.

La Chalcographie, fondée en 1797, détient les cuivres issus du Cabinet des planches gravées du roi instauré par Colbert et ceux de l’ancienne Académie de peinture et sculpture. Elle possède plus de 16 000 planches gravées. En 1935, les héritiers du baron Edmond de Rothschild lèguent au musée 3 000 dessins, 43 000 gravures et 500 livres illustrés, sous la condition de les garder groupés.


Le rayonnement du musée au xxie siècle

S’inscrivant dans la tradition, le Louvre sollicite auprès des artistes contemporains des œuvres décoratives. Déjà en 1953, Georges Braque peint Les Oiseaux au plafond de l’antichambre de l’appartement du Roi. En 2010, François Morellet pose onze vitraux dans l’escalier Lefuel et Cy Twombly exécute The Ceiling dans la salle des bronzes.

Le monde contemporain s’invite aussi grâce à diverses manifestations. « Les Grands invités », par exemple Toni Morrison présente un programme de conférences, expositions et rencontres autour du sujet « étranger chez soi ». À l’occasion de « Contrepoint », Christian Boltanski dialogue avec les objets issus des fouilles du Louvre. Tout en restant attentif à son époque, le Louvre n’a cessé de restaurer ou de réaménager ses espaces pour valoriser au mieux ses collections et de jouer pleinement son rôle pédagogique. Plus de dix millions de personnes par an se pressent afin de visiter cette institution sans pareil.

(1) Très Riches Heures du duc de Berry, le mois d’octobre, musée Condé, Chantilly.(2) Le plafond de la Chambre de parade exécuté par le menuisier Scibec de Carpie a été remonté en 1829 par Fontaine au premier étage de l’aile de la Colonnade.(3) La mémoire d’une fabrique de tuiles s’est conservée dans le toponyme des « Tuileries ».(4) Elles sont remontées dans la Chambre à alcôve au premier étage de l’aile de la Colonnade.(5) La galerie achevée au xixe siècle expose de superbes parures de cette époque. Eugène Delacroix peint Apollon vainqueur du serpent Python au plafond.(6) Les façades de la cour Carrée seront modifiées par Percier et Fontaine.(7) Les vases grecs y sont exposés.(8) Depuis le 1er janvier 2005, il est rattaché à l’Établissement public du Grand Louvre.(9) Cette date de 1848 a été retenue pour partager les collections, lors de l’ouverture du musée d’Orsay en 1986.


Denon, premier directeur du musée

Dominique-Vivant Denon, dessinateur, graveur, diplomate, membre de l’expédition en Égypte, collectionneur, est nommé directeur du Louvre par l’empereur. Entre 1802 et 1815, il supervise le développement des collections, leur présentation et la rédaction du premier inventaire du musée. Il entend constituer un musée encyclopédique à l’opposé des collections royales qui reflètent des goûts individuels. Il gère le butin de la Grande Armée en provenance du Vatican, du musée du Capitole et de Florence. Denon parcourt les territoires conquis par l’empereur dans l’intention de confisquer des œuvres à Munich, Kassel, Berlin ou Postdam. En 1815, elles sont restituées aux Alliés, moins une centaine de pièces dont Les noces de Cana de Paul Véronèse.


Les arts de l’Islam

Une section islamique est dissociée du département des Objets d’art en 1890, annexée aux Antiquités orientales en 1945, puis convertie en département indépendant en 2003 par le président Jacques Chirac. Son domaine concerne la civilisation répandue sur trois continents – de l’Espagne à l’Inde, entre le viie et le début du xixe siècle. Des objets islamiques figurent dans les collections royales, comme le Baptistère de Saint-Louis, des coupes de jade ottomanes appartenant à Louis XIV, l’aiguière en cristal de roche égyptienne du xie siècle préservée à l’abbaye de Saint-Denis. Tissus, métaux, objets précieux en ivoire et cristal de roche originaires de Damas et du Caire, accumulés par les fondations religieuses, complètent le catalogue rédigé en 1793. Au xixe siècle, les conquêtes coloniales et les expositions universelles soulèvent l’enthousiasme des amateurs pour l’Orient. Certains d’entre eux lèguent leurs collections au musée. La baronne Delort de Gléon et Raymond Koechlin offrent divers objets. Georges Marteau cède ses miniatures et la baronne Salomon de Rothschild des armes mogholes et des tapis iraniens. Environ 14 000 objets prennent place dans un pavillon que Rudy Ricciotti et Mario Bellini creusent dans le sous-sol de la cour Visconti en 2012. Les architectes façonnent un écrin dont le toit affleure la cour. La couverture de verre dorée et tissée d’un fin réseau métallique ondulant – tel une aile de libellule – repose sur huit poteaux. Les parois de verre, détachées des murs, laissent apercevoir les façades historiques. Coffrets de bois ou d’ivoire, lampes de mosquée, objets de pierre, de métal, de verre émaillé ou de céramique, armes d’apparat, textiles et tapis, corans enluminés et miniatures témoignent du raffinement des productions artistiques écloses sur les terres de l’Islam.

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