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Dardanelles

Le 1er novembre 1914, l’Empire ottoman entre en guerre aux côtés de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie. Cet empire surnommé, au début du siècle, «l’homme malade en Europe » (1)  en raison de son instabilité politique, de revers militaires et de tensions sociales était, à la faveur d’un coup d’État, tombé entre les mains d’un groupe d’officiers appelés les Jeunes-Turcs en 1908. Ce nouveau régime, bien soutenu par l’Allemagne, avait lancé de nombreuses réformes pour moderniser l’Empire ottoman.

Jusqu’au début de l’année 1914, la Turquie ne semblait pas insensible à une alliance avec les Britanniques. Du reste, à l’été 1909, à l’occasion d’un voyage à Constantinople, Winston Churchill  avait rencontré les leaders Jeunes-Turcs et Enver Pacha avec qui il nouait des relations amicales. Mais lors des années qui suivirent, la cour assidue effectuée par l’Allemagne auprès de Constantinople lui avait procuré des avantages. De plus, si les Turcs souhaitaient se retrouver opposés à leur ennemi historique et redoutable : la Russie, ils considéraient l’État dirigé par Guillaume II comme la puissance militaire prépondérante. Les Britanniques conscients du danger d’une éventuelle alliance de l’Empire ottoman avec l’Allemagne avaient présenté aux Turcs une offre qu’ils considéraient « comme la plus avantageuse faite à un gouvernement à travers l’histoire ». (Winston Churchill). En effet, pour le prix de la conservation de sa neutralité, la Turquie  se voyait garantir l’intégrité absolue de ses possessions non seulement de la part de la Grande-Bretagne et de la France mais également de la part de son ennemi, la Russie. Cette garantie aurait protégé la Turquie des États balkaniques dont au premier plan la Grèce. Mais rien ne pouvait chez les Turcs supplanter la peur de la Russie avec laquelle l’Empire ottoman partageait une frontière de plus de 1500 km qui s’étendait de la mer Noire à la mer Caspienne. Dès lors, au commencement de la Grande Guerre, il n’y avait pour les Alliés plus grand chose à espérer de la Turquie mais plus de craintes à avoir.


L’incertitude turque


Du reste, il n’y eut pas grand temps à attendre. En effet, les Anglais décidèrent de « réquisitionner les deux bâtiments de guerre turcs en construction dans les chantiers navals britanniques ». Une décision lourde de cons qui irrita le gouvernement turc. La tension entre les deux pays s’accrut avec l’arrivée le 10 août dans les Dardanelles de deux navires allemands le Gœben et le Breslau, accueillis par les autorités turques et dirigés à travers un passage dans le champ de mines du détroit.


Le 19 août 1914, le Premier ministre grec Venizélos propose aux puissances de l’Entente de mettre à leur disposition les ressources militaires et navales de son pays. Une proposition qui tente Churchill : « Une combinaison de l’armée et de la flotte grecques avec l’escadre anglaise de la Méditerranée offrait le moyen de régler les difficultés des Dardanelles de la manière la plus prompte et la plus efficace. La péninsule de Gallipoli était alors faiblement occupée par les troupes turques […]. En outre, il me paraissait que de toute façon, la Turquie se rapprochait de la guerre contre nous. Sa conduite en ce qui concerne le Gœbel et le Breslau continuait à être ouvertement malhonnête. » Mais sir Edward Grey conseilla de décliner cette offre craignant d’une part qu’une alliance avec la Grèce ne soit propice à une guerre immédiate avec la Turquie voire même avec la Bulgarie et que d’autre part la Grèce mise en danger personne ne soit en mesure de la protéger ou de l’aider.


La poudrière des Balkans


En septembre 1914, il apparaît plus que probable que l’Empire ottoman entrerait en guerre contre l’Entente. Du côté britannique, on commence à se préparer à cette éventualité en élaborant un plan de conquête de la péninsule de Gallipoli par une armée grecque au cours d’une réunion entre les représentants de l’Amirauté et le service des opérations militaires du War Office. Pour une telle opération, 60 000 hommes sont jugés nécessaires. Il demeure cependant une incertitude : la position de Bulgarie… Sofia offre des garanties quant à sa neutralité mais le gouvernement grec n’y a pas une confiance absolue. Reste que si la Bulgarie se range aux côtés des Turques et que la Serbie est occupé face à l’Autriche la situation sera critique. Seul un corps de l’armée russe pourra alors voler à la rescousse de la Grèce… Mais là encore, un télégramme de Petrograd informe qu’en raison de l’importance des troupes allemandes sur le front de l’Est, la Russie est obligée de rappeler tous ses hommes disponibles d’Asie et du Caucase où elle ne laisse qu’un seul corps d’armée. Par conséquent la Grèce aura à supporter seule le poids de la guerre. Il faut donc laisser tomber ce plan.Le 21 septembre, l’amiral d’escadre Garden, alors à la tête de l’arsenal de Malte, reçoit un télégramme le nommant commandant de l’escadre qui se trouve au large des Dardanelles. Il est averti du renfort de l’Indomitable et de deux cuirassés français afin de couler le Gœben et le Breslau, sans tenir compte de leur pavillon, s’ils sortent des Dardanelles.


La victoire obtenue au cours de la bataille de la Marne calme quelque peu la situation dans les Balkans bien que celle-ci demeure instable. La Turquie paraît avoirt une attitude moins menaçante envers la Grèce. En revanche cette dernière est moins enclin à une participation à la guerre. Les Britanniques, à l’image de lord Kitchener, ont la volonté de ne pas étendre le conflit à des régions encore épargnées. Mais ils savent pertinemment le danger d’une éventuelle extension de la guerre. Ainsi pour les Indes, il convient de maintenir l’Orient aussi calme que possible tant que les divisions indiennes n’ont pas traversé le canal de Suez. D’autre part, ils sont conscients des difficultés pour obtenir l’appui de la Grèce et notamment de son roi Constantin. Enfin une autre incertitude provient de la Bulgarie qui tant qu’elle « ne sera pas convaincue que l’Allemagne ne va pas gagner la guerre, […] ne se laissera pas séduire par aucune promesse » (sir Edward Grey).


La riposte alliée


Mi-octobre, les Britanniques ont vent non seulement des préparatifs turcs pour envahir l’Égypte mais également des garanties qu'Enver Pacha a donné à l’ambassadeur d’Autriche à Constantinople selon lesquelles la Turquie entrera prochainement en guerre aux côtés des Puissances centrales.Un événement précipite le cours des choses. En effet, le 27 octobre, le Breslau et le Gœben soutenus par le croiseur turc Hamidieh et par des contre-torpilleurs sortent de la mer Noire pour bombarder les forteresse turque de Sébastopol, effectuent un raid sur le port d’Odessa et détruisent presque Novorossiisk, ses réservoirs de pétrole et les navires accostés dans le port (29-30 octobre).


La Grande-Bretagne envoie alors un ultimatum à la Turquie où elle réclame « la répudiation de ces actes et le renvoi des missions militaire et navale allemandes dans les douze heures ». À l’expiration de l’ultimatum, la Russie déclare la guerre à la Turquie. Les ambassadeurs anglais et français quittent Constantinople le 1er novembre. Ordre est alors donné d’entamer les hostilités sur mer. Ce 1er novembre, deux contre-torpilleurs britanniques pénétrent dans le golfe de Smyrne détruisant un navire rempli de mines. Ce même jour, l’amiral Carden reçoit l'ordre de bombarder les forts extérieurs des Dardanelles dès qu’il jugera l’occasion favorable. Le bombardement intervient le 3 novembre. Il est effectué sur le côté européen par deux croiseurs britanniques qui tirent sur les batteries de Sedd-el-Bahr et au cap Hellès et sur le côté Asie mineure par des bâtiments français sur les batteries de Kim-Kali et d’Orkanieh. L’opération se solde par d’importants dommages sur les forts turcs. Début décembre, afin de prévenir d’une invasion turque de l’Égypte, les Britanniques fiontdébarquer le corps australien et néo-zélandais à Suez pour défendre le canal.


L’idée d’une attaque sur les Dardanelles


À mesure que le mois de décembre s’écoule, les Allemands « qui avaient tous les avantages de la préparation et de la préméditation […] partout avaient été arrêtés » (Churchill). Il appartenait désormais à la Grande-Bretagne de décider où et quand frapper. Sur le front Ouest, les combattants se trouvent dans une impasse totale tant sur mer que sur terre. La flotte allemande reste à l’abri dans ses ports sans que l’amirauté britannique n’ait trouvé un moyen pour l’en faire sortir. Sur terre, les lignes de tranchée s’étendent de la mer du Nord aux Alpes sans réelle possibilité de manœuvres comme l’ont démontré hélas les opérations terrestres déclenchées tout au long de l’année 1915. En résumé, les amiraux placent leur confiance dans le blocus naval à l’encontre de l’Allemagne, les généraux ont recours à une guerre d’usure et à de meurtrières tentatives pour percer le front ennemi. Le 1er janvier 1915, Lloyd George rédige une note « sur la nécessité d’une action dans les Balkans pour rallier la Grèce et la Bulgarie à la cause des Alliés ».


Le 2 janvier, lord Kitchener envoie une lettre à Winston Churchill : « Vous avez certainement vu le télégramme de Buchanan (2)  au sujet des Russes et des Turcs […]. Croyez-vous qu’une action navale serait possible pour empêcher les Turcs d’envoyer plus d’hommes dans le Caucase en dégarnissant Constantinople ? » La position des Russes dans le Caucase est, à ce moment là, inquiétante, les Turcs ayant débuté un mouvement enveloppant qui les menace.


Le commandant en chef des forces du Caucase réclame alors des renforts en urgence. Mais le grand-duc lui indique qu’il devra faire avec les troupes qu’il a mais demande à lord Kitchener « s’il serait possible d’organiser ailleurs une démonstration quelconque contre les Turcs, que cette opération soit navale ou militaire, et de répandre des bruits de nature à amener les Turcs […] à retirer une partie des forces qui combattent actuellement les Russes dans le Caucase, rendant ainsi plus aisée la position des Russes ». Après une rencontre avec Churchill à l’Amirauté, lord Kitchener lui adresse une lettre le 2 janvier : « Je ne vois pas, écrit-il, que nous puissions faire quoi que ce soit de nature à aider bien sérieusement les Russes dans le Caucase. Il est évident que les Turcs sont en train de retirer la plus grande partie de leurs troupes d’Andrinople et qu’ils les emploient à renforcer leur armée contre la Russie; ils les transportent probablement par le mer Noire. Dans le Caucase, […] les Russes sont mal en point. Nous n’avons pas de troupes à débarquer où que ce soit. Une démonstration contre Smyrne ne servirait à rien et risquerait de provoquer le massacre des chrétiens. […] Le seul endroit où une démonstration pourrait contribuer à arrêter le transport des renforts vers l’Est serait les Dardanelles […] ». Churchill at souhaité dès la déclaration de guerre porter une attaque à Gallipoli mais depuis, les difficultés s’e sont accrues… Lord Kitchener fait envoyer à Petrograd un télégramme : « Veuillez assurer le grand-duc que nous allons faire une démonstration contre les Turcs. Il est toutefois à craindre qu’aucune initiative à notre portée ne soit de nature à influer sérieusement sur les effectifs de l’ennemi au Caucase ou à en amener le retrait ». De nature à répondre à la requête russe, ce télégramme engage les Britanniques à effectuer « une démonstration contre les Turcs » sans en spécifier ni le lieu, ni la date, ni l’ampleur. Le lendemain, 3 janvier, lord  Fisher, favorable à l’exécution d’un plan contre les Turcs, écrit à Churchill : « Je suis partisan convaincu de l’attaque contre la Turquie ! » Et de développer dans sa missive ce qu’il convient de faire contre les Turcs :


« I. Nommer sir W. Robertson, l’actuel directeur du service du matériel, au commandement du corps expéditionnaire.

II. Remplacer immédiatement tous les Indiens et 75 000 hommes aguerris de l’armée de sir John French par des réservistes venus d’Angleterre (ainsi que vous l’avez suggéré vous-même) et embarquer ce corps expéditionnaire à destination de la Turquie en faisant croire qu’il part pour protéger l’Égypte […]

III. Lancer les Grecs sur Gallipoli en même temps que nous attaquons Besika, les Bulgares sur Constantinople et les Russes, les Serbes et les Roumains contre l’Autriche […].

IV. Sturdee force en même temps les Dardanelles avec les bâtiments de classe Majestic et Canopus ! […] ». Il n’y avait aucune chance pour que le plan de Fischer soit réalisé ! Il aurait provoqué des protestations de Joffre et du gouvernement français voire la démission de French (paragraphe II), mais il contenait une idée : celle de forcer les Dardanelles avec de vieux cuirassés (paragraphe IV). Les autorités politiques, navales et militaires britanniques semblent adhérer à l’idée d’une opération sur les Dardanelles. Lloyd George veut user de son influence à cette question de la Turquie et des Balkans. Son objectif n’est-il pas de voir les États balkaniques se rallier contre l’Autriche et la Turquie. De son côté, M. Balfour y voit les avantages d’une action réussie sur ce théâtre du sud-est de l’Europe. Enfin sir Edward Grey est lui aussi favorable à cette attaque. Comme le note Churchill, «il y avait consentement unanime. Il y avait là, semblait-il enfin, assez d’élément réussi pour passer à l’action ».  Restait à réaliser un plan d’attaque…


L’élaboration d’un plan d’action


Ce 3 janvier, l’amiral Carden, commandant aux Dardanelles, reçoit un télégramme en provenance de l’amirauté : « Estimez-vous qu’il soit possible de forcer les Dardanelles par mer seulement ? Partir de l’hypothèse de l’utilisation de vieux cuirassés munis de tisseurs de mines précédés de charbonniers ou d’autres navires de commerce qui serviraient de tisseurs de mines et de dragueurs. L’importance des résultats justifierait des pertes sérieuses […] ». En réponse le 5 janvier,  l’amiral Carden écrit au Premier lord : « Je ne considère pas une opération rapide possible pour les Dardanelles. On parviendrait peut-être à les forcer au moyen d’opérations de grande envergure avec un grand nombre de bâtiments ». Le 6 janvier, un nouveau télégramme est envoyé à l’amiral Carden : « Votre opinion est partagée par de hautes autorités ici à Londres. Veuillez télégraphier en détail quel pourrait être, à votre avis, le résultat d’opérations de grande envergure, quelles seraient les forces nécessaires et comment, d’après vous, elles devraient être employées ».Le 8 janvier a lieu une réunion du Conseil de guerre britannique au cours de laquelle lord Kitchener se prononce en faveur d’une attaque des Dardanelles mais réserve son opinion jusqu’à ce que la question aitt été l’objet d’une étude minutieuse…


Le 11 janvier, l’amiral Carden envoie son plan d’action qui, selon les dires de Churchill « produisit une forte impression sur quiconque le vit […]. Le Premier lord naval et le chef de l’état-major parurent tous deux l’approuver. Jamais personne émit le moindre doute sur sa valeur technique […]. Au contraire, ils traitèrent tous le projet comme constituant une proposition extrêmement intéressante et pleine de promesses, et on vit se développer un état d’esprit nettement favorable à l’opération […] ». Preuve en est avec cette proposition de l’état-major de guerre de la marine d’envoyer le Queen Elizabeth (3)  essayer ses canons contre les Dardanelles au lieu d’effectuer ses tirs de réglage dans les eaux de la Méditerranée…Le 12 janvier, une liste de bâtiments susceptible de constituer la flotte nécessaire à l’opération est établie. Le 13, le projet est soumis au Conseil de guerre qui ne fait aucune objection. Sa décision est ainsi consignée : « […] Que l’Amirauté devra aussi prépare pour février une expédition navale destinée à bombarder et à capturer la presque’île de Gallipoli avec Constantinople pour objectif ». Un nouveau télégramme est alors envoyé à l’amiral Carden l’informant que son « plan a été soumis par le Premier lord naval […] au Conseil de la guerre du cabinet et a été approuvé sur son principe. Nous ne voyons pas de difficultés à vous fournir les forces navales dont vous avez besoin, y compris le Queen Elizabeth, pour le 15 février. Nous adhérons absolument à votre projet de réduction méthodique des forts un par un […] Nous nous proposons de vous confier l’opération. L’amiral de Robeck vous secondera vraisemblablement […] ».


Les projets d’attaque sont alors communiqués au gouvernement français par l’intermédiaire de l’attaché naval français, un texte contresigné par le premier ministre britannique, lord Kitchener et sir Edward Grey, par le premier lord naval et le chef de l’état-major.

Une action combinée avec des troupes terrestres ?

Jusque vers le 20 janvier, il semble qu’il y ait eu un accord unanime pour cette opération navale contre les Dardanelles. Mais alors que les négociations avec les gouvernements français et russe progressent, que de nombreux préparatifs ont été effectués, que des navires sont en route, lord Fischer fait entendre une voix opposée à l’opération à laquelle il avait, jusque-là, volontiers apporté son soutien. Le 25, il demande qu’un mémorandum résumant sa position soit envoyé au Conseil de la guerre. Il y soutient qu’une offensive comme celle des Dardanelles peut « dissiper nos forces dans des opérations qui ne peuvent améliorer nos positions ». Lord Fischer annonce même son intention de ne pas assister au Conseil de guerre prévu le 28 janvier. Ce qui est impossible et inimaginable. Une réunion préliminaire au Conseil entre le Premier ministre britannique, Winston Churchill et lord Fischer est décidée. Il y expose ses objections, indique sa préférence pour une grande opération dans la Baltique ou pour une offensive générale de l’armée le long de la côte belge avec un appui naval.. Ce 28 janvier, le Conseil de guerre se prononce résolument et définitivement en faveur de l’opération navale contre les Dardanelles. Mais il fait également part de son souhait d’influer sur la situation politique des Balkans par l’envoi de troupes terrestres. « On ne songeait pas alors à réunir des forces suffisantes pour partir à l’assaut de la presqu’île de Gallipoli et personne n’aurait donné son aval à une telle opération. Tout ce que l’on espérait, c’était de pouvoir prélever sur les forces qui se trouvaient en Angleterre […] pour les utiliser ensuite comme un levier destiné à encourager M. Venizélos, le roi et le gouvernement de Grèce à entrer dans la guerre à nos côtés pour venir en aide à la Serbe » (Winston Churchill).Les préparatifs pour l’offensive navale suivent leur cours. Les navires devant participer à cette attaque arrivent sur les lieux ou s’en approchent.


À la faveur d’un accord officieux avec avec le Premier ministre grec, Venizélos, l’île de Lemnos avec le port de Moudros, sert de lieu de rassemblement à la flotte alliée. Elle est rejointe par des troupes terrestres, deux bataillons d’infanterie de marine de la division navale royale britannique. Cette force doit fournir des compagnie de débarquement au cas où se présenterait l’occasion de détruire des canons ou des forts turcs hors de combat dans la presque’île de Gallipoli alors dépourvue de résistance. Dans certains esprits britanniques germe alors l’idée de « réunir les forces terrestres nécessaires pour recueillir les fruits de cette grande entreprise navale; les navires qui les transporteront devront se tenir prêts à entrer dans les Détroits dès que les forts de la passe de Tchanak auront été réduits au silence […]. Le bombardement naval n’est pas une opération à recommander, à moins qu’une force militaire puissante ne se tienne prête à y collaborer ou, au moins, à entrer en action aussitôt après la réduction des forts » (sir Henry Jackson). Ces derniers propos sont pour le moins ambigus. La différence entre « collaborer » à l’action et « entrer en action » est fondamentale. Fisher en revanche est lui parfaitement clair : il souhaite que l’armée donne l’assaut et occupe la presqu’île de Gallipoli. Une idée qui n’est alors pas dans l’esprit de lord Kitchener ni dans celle du Conseil de la guerre britannique. Du moins pas encore…


(1)  Kevin Fewster, Vecihi Basarin et Hatice H. Basarin, Gallipoli : The Turkish Story, Crows Nest, Allen & Unwin, 2003 (1re éd. 1985).

(2) Sir George Buchanan, ambassadeur de Grande-Bretagne en Russie.

(3) Un cuirassé rapide qui venait d’être achevé, armés de canons de 380.

 

 

 

 

 

Bibliographie


M. Gilbert, Churchill and Gallipoli, J. MacLeod (dir.), New York-Londres, Frank Cass, 2004.Max Schiavon, Le front d’Orient. Du désastre des Dardanelles à la victoire finale (1915-1918), Tallandier, Paris, 2014Daniel Carrasco, La bataille des Dardanelles, la guerre oubliée ; édition à compte d’auteur, 2015.Leslie Allen Carlyon, Gallipoli ; Bantam Books, Londres, 2001.Lyn MacDonald, 1915 - The Death of Innocence ; Penguin Books, Londres, 1993.Winston Churchill, Mémoires de la Grande Guerre, 1911-1915, Éd. Tallandier, 2014.

 

 

 


L’amiral Carden


Sackville Hamilton Carden (1857–1930) né en Irlande. Troisième fils d’Andrew Carden et d’Anne Berkeley, il choisit la Royal Navy en 1870 alors que son père et son grand-père avaient servi dans l’armée de terre. Il sert en Égypte puis au Soudan et en 1897 au Bénin où il participe à une expédition punitive. Nommé capitaine (1899) puis rear admiral (*)(1908), il sera affecté à la flotte de l’’Atlantique et reçoit le commandement du HMS London durant une année. Il sera plus tard en poste à l’Amirauté jusqu’en 1912 où il est nommé responsable de la base de Malte. En septembre 1914, il est commandant de l’escadre britannique en Méditerranée. Suite à l’entrée en guerre de l’Empire ottoman, l’Amirauté lui demande de présenter un plan pour ouvrir le détroit des Dardanelles. Son plan drepose sur une destruction systématique des fortifications turques le long des Dardanelles en même temps qu'un déminage des eaux. Il sera commandant en chef des forces navales britanniques lors de la bataille des Dardanelles avant d’être relevé de ses fonctions pour des problèmes de santé.

(*) grade inférieur à celui de vice-amiral.

 


Lord Kitchener


Né à Ballylongford (Irlande) le 24 juin 1850, Horatio Herbert Kitchener, dit lord Kitchener entre à la Royal Military Academy de Woolwich en 1868. En 1870, il est auprès de sa famille à Dinan (Côtes d’Armor) lorsqu'éclate la guerre franco-prussienne. Il s’engage comme volontaire dans l’armée de Napoléon III. Une pneumonie l’oblige à rentrer en Grande-Bretagne avant la fin du conflit. Devenu  officier du Royal Engineers en janvier 1871, il effectue plusieurs séjours en Palestine  et en Égypte, il s’illustrera notamment en se confrontant au capitaine Marchand au cours de la crise de Fachoda (1898) puis lors de la seconde guerre des Boers (1899-1902).En août 1914, il est nommé ministre des la Guerre. Il mène campagne pour l’engagement des volontaires au sein de l’armée britannique qui est couronnée de succès. La campagne des Dardanelles entamera un peu son crédit auprès du public mais il demeurera très populaire. Il se brouille avec Lloyd George. Il sera destitué de son poste de ministre et de chef de l’état-major. Il trouve la mort  le 5 juin 1916, à l’âge de 65 ans, au cours du naufrage du HMS Hampshire, au large des  Orcades.

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