Dentistes
- Rose Hareux
- Jul 10, 2024
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Début 1915, une revue parisienne traitant de « médecine historique, littéraire et anecdotique », se fait l’écho enthousiaste d’un événement survenu quelques semaines plus tôt au sein du corps expéditionnaire britannique. La chronique intitulée « extraction sous la mitraille », par un récit où le trait est certainement exagéré, entend montrer le courage et le savoir-faire d’un dentiste français ayant secouru un important chef allié : « Sir Douglas Haig, qui vient d’être nommé général dans l’armée anglaise et possède une réputation légendaire de froide témérité, a été, lors des batailles de la Marne, le héros d’une aventure qui mérite d’être rapportée. Il fut subitement pris un matin d’une terrible rage de dents. En hâte, on télégraphia à Paris à un dentiste auquel il voulait confier sa mâchoire et le praticien partit sans retard. L’automobile qui le conduisait atteignit les lignes de feu. Trois obus vinrent successivement l’endommager et une marmite finalement lui brisa une roue. La boîte à instruments du dentiste fut projetée au loin et on eut toutes les peines du monde à la retrouver. Après une longue marche à pied, l’opérateur parvint enfin au quartier général de sir Douglas Haig, non sans avoir été à plusieurs reprises pris pour un espion et interrogé en conséquence. Il trouva l’officier, quoique souffrant, en train de déjeuner, impassible au milieu des obus qui pleuvaient et c’est sous la mitraille, dans le bruit assourdissant des canons que le praticien enleva, d’une main un peu moins ferme que d’habitude, la dent mauvaise. » (1)
En ces premiers mois de conflit, la rapidité avec laquelle le chef du 1er corps britannique bénéficie de cette intervention providentielle à même la ligne de front, n’est pas représentative du sort alors habituellement réservé aux soldats français en matière de soins dentaires. Et pour cause, au déclenchement des hostilités, le Règlement sur le service de santé de l'armée à l'intérieur (2), la Direction du service de santé en campagne (3) et le Service de santé en campagne (4), ne font aucune mention des dentistes. Cela tient au fait que la loi du 16 mars 1882 « sur l’administration de l’armée » n’avait pas reconnu cette spécialité en son sein (5). Il est vrai qu’en ces premières années de la IIIe République la profession n’était pas réglementée, puisque faisait toujours jurisprudence un arrêt de la Cour de cassation du 23 février 1827, qui stipulait « que celui qui se born[e] à exercer la profession de dentiste n'[est] pas soumis à l'obligation de se munir d'un diplôme. » (6) Il faut attendre la loi du 30 novembre 1892, dite loi Brouardel (7), pour que les dentistes soient enfin tenus de suivre un cursus universitaire spécifique, assurant de fait une meilleure reconnaissance de leur spécialité. Toutefois, l’un des plus ardents promoteurs de la médecine dentaire dresse, en 1899, un constat encore mitigé pour ce qui concerne l’armée : « L'un de ces progrès, indirectement, consiste surtout à imposer aux médecins militaires la connaissance plus exacte des affections buccales et dentaires et la pratique des opérations que celles-ci comportent, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait encore mieux à faire au point de vue de l'instruction des élèves du service de santé. Lorsque cet enseignement sera sérieusement donné, il assurera aux soldats les soins éclairés qu'ils trouvaient si difficilement autrefois. » (8) Le praticien estime que dans les casernes, « il resterait à assurer pour les soldats […] un examen périodique de la bouche ; on pourrait au moins faire pour celle-ci ce qui se fait pour les pieds ; ce n'est pas être trop exigeant. Il y aurait lieu aussi à prescrire aux soldats, en leur accordant le temps et les moyens nécessaires, de se laver la bouche au moins sommairement avec de l'eau bouillie et une brosse une fois par jour, chose qui ne semble ni très difficile ni très compliquée. » (9) Encore faudrait-il généraliser à toute l’armée les ustensiles et les produits nécessaires. Or, en application d’une dépêche ministérielle datant du 17 avril 1879, seuls les hommes servant dans les unités coloniales sont pourvus « d’une brosse à dents qui [fait] partie du sac de petite monture du soldat, au même titre que les autres objets de toilette et de propreté » (10). De même, au début du XXe siècle, les soins dentaires constituent un luxe inaccessible pour beaucoup de Français qui ne bénéficient pas d’assurances sociales. Face à ce constat, le 3e congrès dentaire international réuni à Paris à l’occasion de l’Exposition universelle de 1900, émet à l’adresse du ministre de la Guerre et des commissions de l’Armée à la Chambre des députés et au Sénat, le vœux « que le service de santé des armées de terre et de mer comprenne des dentistes comme il comprend des médecins, des pharmaciens, les soins dentaires étant nécessaires en général aux soldats en temps de paix comme en temps de guerre » (11). Car jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’École de Saint-Cyr implantée près de Versailles est la seule formation militaire qui dispose d’un cabinet dentaire. Il a pour patients les élèves officiers et les cadres, les soins étant dispensés par un praticien civil (12).
L’idée qui est promue par la profession est d’en ouvrir d’en d’autres garnisons, en recourant à de jeunes diplômés lorsqu’ils sont appelés au service militaire. Ce vœu connaît une ébauche d’application puisque, « en 1900, deux services dentaires sont ouverts à l’hôpital du Val-de-Grâce, à Paris, et l’hôpital Desgenettes, à Lyon. Les soins qui y sont dispensés sont ce qui se fait de plus simple en matière d’odontologie : détartrages, extractions, cautérisation des gencives et obturations dentaires » (13). Les meilleurs élèves des écoles dentaires sont affectés à ces deux hôpitaux comme soldats de 2e classe, le temps de leur passage sous les drapeaux. Mais infiniment plus nombreux sont les jeunes diplômés qui n’ont pas la chance de pratiquer leur art et qui, de fait, sont incorporés dans les unités de combat. Au demeurant, la profession est divisée. En 1907, un dentiste des troupes coloniales, professeur à l’école dentaire de Paris et par ailleurs chargé de l’enseignement de la chirurgie dentaire aux médecins coloniaux, estime que la ressource en diplômés est insuffisante pour que tous les régiments aient leur cabinet (14). Ce qui n’est pas un problème aux yeux de nombreux cadres, puisque l’inutilité des dentistes militaires est une nouvelle fois réaffirmée dans l’influente revue Le Progrès militaire, au motif que « les médecins de l’armée savent et pratiquent l’essentiel de l’art dentaire »(15).
Les dentistes: «Une gêne, un embarras»
Pourtant, en 1905, une sommité de l’odontologie lance un plaidoyer, très documenté, pour que la France développe dans les casernes une véritable politique de santé dentaire (16). À la même époque, la Fédération dentaire nationale sollicite des pouvoirs publics qu’ils créent un service dentaire militaire qui pourrait ainsi s’occuper des jeunes Français incorporés sous les drapeaux. Ces appels sont en partie entendus parce que le commandement prend conscience que les rages de dents sont à l’origine de nombreuses indisponibilités, voire une cause de réforme parmi les soldats, à une époque où les effectifs sont l’une de ses principales préoccupations. Le sous-secrétaire d’État à la guerre, Henry Chéron, ne cèle pas cette motivation en introduction de la circulaire n° 60 qu’il signe le 10 octobre 1907, laquelle stipule qu’« il sera donné au Val-de-Grâce un enseignement de la stomatologie par un médecin-major pourvu du diplôme de chirurgien-dentiste. D'autre part, les dispositions suivantes seront appliquées dans les corps de troupes.
Au moment de l'incorporation, les médecins examineront la bouche et les dents de chaque soldat et mentionneront leurs constatations sur une fiche appelée "fiche dentaire" qui sera tenue à jour tous les trois mois » (17).Dans une circulaire du ministère de la Guerre du 1er octobre 1907, trois services de stomatologie sont créés « ayant à leur tête des médecins spécialisés. Ceux-ci sont autorisés à employer, sans avantage ni compensation d’aucune sorte, les chirurgiens-dentistes du contingent accomplissant leur temps de service [militaire] » (18). Trois cabinets dentaires supplémentaires sont ouverts au profit des garnisons de Paris, Lyon et Bordeaux, en application d’une nouvelle circulaire du 2 décembre 1910 : « Des soins basiques y sont là aussi prodigués. Le dentiste est placé sous l’autorité du médecin en chef de la place » (19).Néanmoins, la formation dispensée au Val-de-Grâce demeure sommaire : d’une durée de quinze jours, elle permet seulement « aux jeunes aides-majors d'acquérir les notions primordiales de l'art dentaire » (20). La nomenclature des instruments et des rares produits mis à la disposition des infirmeries et des hôpitaux militaires reste celle fixée par la circulaire ministérielle du 12 avril 1890 (21). De même, l’offre de soins est très disparate selon qu’il s’agit d’une garnison disposant d’un hôpital militaire ou d’une modeste infirmerie régimentaire, mais également, selon l’intérêt que le médecin qui en a la charge, prête à cette question. Aussi, la même conclusion, maintes fois formulée prévaut : « Il n'est pas besoin d'insister sur l'importance de la création des cliniques dentaires à la caserne, car la statistique de l'armée atteste la fréquence des maladies de la bouche et des dents, ainsi que le nombre de journées d'indisponibilité qu'elles occasionnent » (22). Convaincue qu’il en va de l’intérêt du pays à un moment où la menace d’un conflit avec l’Allemagne se fait plus précise, la Fédération nationale dentaire renouvelle sa demande, « avec plus d'insistance encore en mars et mai l913 au moment où le Parlement procédait à des remaniements dans l’organisation de l’armée, et avait à se prononcer sur le service de trois ans » (23).
Mais dans une lettre en date du 5 mai, Eugène Étienne, ministre de la Guerre, dénie une nouvelle fois l’utilité d’un tel service, considérant même que pour une armée en campagne, « les dentistes ne pouvaient qu’être gêne et embarras »(24). Car le commandement est convaincu d’une guerre courte, égale ou à peine plus longue que la périodicité trimestrielle de suivi bucco-dentaire qu’impose la circulaire de 1907, ne rendant de fait pas indispensable l’emploi des dentistes au front.
Les dentistes, de simples combattants
Le 2 août 1914, à la veille de la déclaration de guerre à l’Allemagne, les dentistes en âge de servir sous les armes rejoignent le régiment que leur désigne leur ordre de mobilisation. Faute d’un texte leur attribuant une « affectation spéciale », en lien avec leurs compétences (25), ceux-ci peuvent au mieux servir en qualité d’infirmiers, voire de brancardiers, quand ils ne sont pas d’anonymes combattants, à l’instar du caporal Henri Goubet, tué à l’ennemi le fusil à la main (26). Malgré tout, ceux que l’opinion publique n’appelle pas encore les poilus peuvent bénéficier de soins dentaires, car « à l'armée, partout où il se trouve, le chirurgien-dentiste, mobilisé comme simple soldat, emporte avec lui – en surcroît de son paquetage – ses propres instruments qu'il renouvelle à ses frais s'il les perd dans une retraite ou un bombardement ; mitrailleur, canonnier, veilleur ou garde de voies, le chirurgien-dentiste remplit sa mission militaire et, sur ses heures de repos, il prend le temps nécessaire au soulagement de ses camarades. » (27). Parfois, comme au 133e R.I., le régiment prend à son compte le précieux matériel du dentiste incorporé dans ses rangs en se chargeant sur les deniers du corps, « de l’entretenir et de le remplacer le cas échéant » (28). Dans tous les cas, les conditions d’intervention sont très rudimentaires : « Un fauteuil et quelques sièges d'osier trouvés on ne sait où, une brouette renversée et recouverte d'une serviette, deux fascines et une haie comme paravents, et voilà le cabinet dentaire installé. L'homme de l'art, un simple infirmier ; ses outils, un davier démodé ; un peu de teinture d'iode aussi sans doute » (29).
Dans 75 % des cas, lorsqu’ils en disposent, l’anesthésiant utilisé est de la novocaïne, qui existe sur le marché depuis son invention en 1904 (30), plus rarement par pulvérisation de chlorure d’éthyle. Mais l’utilité et le bénéfice de ces soins improvisés sont tels que dès le 15 octobre 1914, soit seulement après quelques semaines de guerre, « une circulaire ministérielle autorise le versement de chirurgiens-dentistes dans les sections d’infirmiers militaires afin d’être utilisés dans leur spécialité, mais toujours comme soldats, pour les soins d’urgence aux combattants » (31). Le 21 décembre, la circulaire n° 18838-C/7 ordonne l’affectation d’un dentiste-prothésiste par hôpital d’évacuation, « pour l’application des pansements spéciaux et des appareils provisoires de contention, destinés aux blessés atteints de mutilation de la face et des mâchoires » (32). De plus, elle prévoit l’utilisation de dentistes qualifiés pour prodiguer aux militaires de la zone des armées, les soins nécessités par des affections dentaires. Ces praticiens sont plus particulièrement employés au sein des ambulances divisionnaires. Un dentiste, qui à la demande du directeur du service de santé de son corps d’armée a improvisé un cabinet à Clermont-en-Argonne, assure 10 616 consultations entre novembre 1914 et novembre 1915 (33). Ce chiffre ne reflète du reste pas la totalité des soins dispensés au sein de ce corps d’armée, car en avril 1915, l’une des divisions qui le compose avait pris l’initiative d’ouvrir un second cabinet dans la forêt d’Argonne, grâce au matériel de dentiste offert par un riche mécène, assurant 1 570 consultations supplémentaires au cours des deux premiers mois d’existence (34).
L'importance des soins dentaire reconnue !
À l’occasion d’une correspondance qu’il adresse à sa femme le 19 septembre 1915, Henri Barbusse lui « envoie la photo de monsieur Kopp, dentiste de [son] régiment, en train d’opérer » (35). Car au fil des mois, l’intervention des dentistes est rendue d’autant plus indispensable que la vie dans les tranchées qui s’est imposée aux combattants – en raison d’une hygiène précaire sinon inexistante, et des difficiles conditions climatiques de l’hiver continental – autant que la consommation d’alcool, mettent à rude épreuve leur dentition ; alors que dans le même temps, « la nourriture des hommes en campagne nécessite un bon coefficient de mastication, car au front elle est presque exclusivement carnée » (36). Or une mastication insuffisante entraîne rapidement des maladies de l’estomac. Aussi, l’instruction ministérielle du 30 août 1915, « pour l'application de l'article 3 de la loi du 17 août 1915, assurant la juste répartition et une meilleure utilisation des hommes mobilisés et mobilisables », prévoit que les chirurgiens-dentistes soient désormais, comme les étudiants en médecine et pharmacie, affectés aux sections d’infirmiers (37). La mesure vient corriger certaines décisions hâtives qui n’avaient pas été très heureuses et que le 20 août, le député Georges Boussenot dénonce sans ménagement en séance : « Il faut éviter de confondre les dentistes avec les mécaniciens dentistes. Le mécanicien dentiste n'est pas susceptible de soigner les dents, il prépare des appareils de prothèse mais il est incompétent pour soigner la bouche. Eh bien des mécaniciens ont été utilisés comme dentistes. Je n'ai pas besoin d'ajouter que les services ainsi rendus ont été pitoyables » (38). Déployer des praticiens compétents au plus près des combattants pour réaliser les soins dentaires apparaît comme une évidence, ainsi que l’écrit Georges Villain, secrétaire de la Fédération dentaire nationale, pour qui « les traitements d'urgence doivent être exécutables en tout lieu, à toute heure, mais c'est au front, aux premières lignes, qu'ils trouvent leur application principale » (39).
Pour cela, le député des Basses-Alpes Joseph Reinach réclame le 2 mars 1915 « qu'un médecin ou chirurgien dentiste soit affecté dans chaque régiment au service dentaire, qu'un essai d'automobile dentaire soit effectué dans un corps d'armée […], que les chirurgiens dentistes […] qui n'ont pas encore reçu une destination médicale, forment le contingent des sections d'infirmiers militaires. » (40). Quelques jours plus tard, c’est au tour de Paul Strauss, sénateur de la Seine, de défendre devant la commission supérieure consultative du service de santé de l’armée, au sein de laquelle siègent des parlementaires, l’idée qu’il faut soulager les douleurs dentaires jusque dans les tranchées, tout en jugeant aussi indispensable de prendre en charges les terribles blessures des mâchoires et les mutilations de la face. Le 31 mars 1915, puis à nouveau le 28 mai, la commission du service de santé est informée « que des instructions [ont] été données pour l'affectation au service dentaire, dans chaque régiment, d'un dentiste, et pour la désignation, dans chaque hôpital d'évacuation, d'un dentiste-prothésiste » (41). Le directeur du service de santé au ministère de la Guerre fait également savoir « que s’il n'avait pas été possible, jusqu'alors, d'installer un service dentaire dans tous les régiments, toutes les armées [ont] organisé ce service dans les cantonnements, les ambulances, les centres hospitaliers et les hôpitaux d'évacuation » (42). En dépit de ces avancées, la question des soins dentaires aux armées demeure d’actualité jusqu’à la fin du conflit. Car leur organisation est toujours jugée déficiente ou tout au moins insuffisamment étoffée, et fait par conséquent l’objet d’une nouvelle interpellation à la Chambre des députés dès la séance du 22 juillet 1915. Cette fois, en guise de réponse, la commission est informée « de la construction et de l'envoi en service d'une automobile dentaire. » (43).
Cette dernière, officiellement présentée au secrétaire d’État à la guerre Justin Godart le 31 juillet, est considérée comme un prototype. Les enseignements tirés de son utilisation expérimentale doivent permettre, rapidement, d’améliorer les véhicules suivants dont la fabrication est néanmoins lancée, puisque le second exemplaire entre en service le 15 octobre. L’objectif est de les affecter à raison d'une par armée, sachant qu’une armée occupe entre 30 et 80 km de front. Mais, quelle que soit la valeur de ces « voitures de stomatologie » (44), notamment pour les performances qu’elles permettent d’accomplir en matière de soins, le médecin a qui est confiée la première d’entre elles, rend rapidement compte au directeur du service de santé des étapes dont il relève, qu’il ne lui est pas possible de soutenir efficacement plus de 4 corps d’armée en même temps. Et pour cause : entre octobre 1915 et janvier 1916, le personnel armant la voiture effectue chaque jour environ 43 consultations, extrait 47 dents, faits 12 obturations et pose 6 pansements. Les soins concernent des inflammations des gencives, de la muqueuse buccale, de la pulpe dentaire ou du périoste. L’équipe traite aussi en moyenne deux tumeurs dentaires, des fractures du maxillaire ou des accidents de dents de sagesse. Enfin elle confectionne ou répare quotidiennement deux dentiers, appareils ou pièces de prothèse (45). Des voitures dotées de deux fauteuils, et qui sont opérationnelles une demi-heure après leur arrivée dans un cantonnement, permettent de traiter jusqu’à une centaine de patients par jour, tant pour des soins que pour de l’appareillage : en septembre 1916, la voiture n° 14 reçoit à titre d’exemple, 1 555 patients qui font l’objet de 2 090 actes (46).
Un manque cruel de moyens
Pour autant, et à la différence de l’armée canadienne qui a créé un « corps dentaire » le 13 mai 1915, la France tarde à reconnaître la spécialité de dentiste aux armées. Le médecin aide-major de 1re classe Gaumerais rapporte dans Paris Médical comment un commandant d’armée qui, pour sa part, ressent le besoin d’une telle spécialité pour ses hommes, prend lui-même l’initiative de mettre sur pied un service de stomatologie (47). Ce praticien souligne une nouvelle fois la nécessité de disposer de dentistes au plus près des combattants et se fait le fervent promoteur des voitures stomatologiques. Du reste, au plan national, le 9 septembre 1915 un rapport commandé par Georges Villain plaide pour que ce manque soit comblé. Si bien qu’à l’initiative du général Gallieni, ministre de la Guerre, un décret du 2 mars 1916 crée enfin, mais seulement pour la durée du conflit, un corps de dentistes militaires (48). Un second décret, du 26 avril suivant, répartit ces dentistes militaires dans les trois zones, de l’avant, des étapes et de l’arrière (49).
Mais compte tenu de l’énormité des besoins en matière de soins dentaires aux armées, les mesures prises au printemps et puis à l’été 1915 ne portent pas immédiatement leurs fruits. Douze mois plus tard, le journal Le Gaulois fustige sans retenu les décideurs, laissant entendre que la situation n’a pas changé pour les poilus, et que ces derniers ne peuvent espérer d’améliorations avant longtemps : « Nous avons cependant en France une Académie de médecine, une Académie des sciences. Que font tous ces éminents personnages et surtout un secrétariat au service de santé. Que fait ce dernier lorsqu'il empêche, par des circulaires, une évacuation à l'arrière pour soins dentaires spéciaux, puisque le dentiste à proximité du front n'a pas d'installation suffisante pour procéder à ces soins que le patient consentirait à faire effectuer à ses frais ? Après presque deux ans de front, n'aurait-il pas droit à plus d'égards et de sollicitude quand sa santé en dépend ? […] Évidemment, bien des améliorations seraient utiles et donneraient satisfaction à ceux qui combattent l'envahisseur avec tant d'héroïsme et d'abnégation. Nous avons été surpris par la guerre et par la durée de la guerre où tout était à organiser. Croyons à la bonne volonté de tous. Ainsi le service dentaire est tout entier en voie de réorganisation. Des voitures dentaires automobiles sont prêtes et rendront de grands services. Hélas on ne crée pas en quelques mois tout ce qui est nécessaire à une armée de cinq millions d’hommes. »(50).
La présence de ces cabinets dentaires sur roues au milieu des combattants n’a pas qu’un caractère anecdotique, puisque Barbusse, dans le témoignage qu’il livre à peu près au même moment de la vie au front, évoque la « voiture-dentiste » (51). Néanmoins, fin 1916, le député Prosper Josse interpelle une fois encore le ministre de la Guerre sur le fait qu’il n’y a aux armées qu’un dentiste pour 7 000 combattants (52). Il lui signale « tout l’intérêt qu’il y aurait à ce que chaque régiment ait un dentiste à sa disposition pour les extractions et les premiers soins, ainsi que pour éviter de rendre de nombreux hommes indisponibles à l’arrière pendant de longs jours. » (53). Outre bien sûr de doter les dentistes des moyens matériels nécessaires à l’exercice de leur art, « que l’on attend depuis trop longtemps » (54), Prosper Josse propose également de conduire une action préventive, en rendant « obligatoire la visite de la bouche pour tous les militaires des dépôts et des hôpitaux et le traitement immédiats des bouches en mauvais état, pour réduire au minimum les soins à donner dans la zone des armées et éviter de nombreuses indisponibilités. » (55) Cette règle avait déjà été édictée dans une circulaire de 1907. Mais elle n’avait connu qu’un timide début d’application. Or, avec la mobilisation générale, et compte tenu que l’armée française aligne désormais quelque 700 régiments regroupés en 150 divisions, autant qu’en raison des besoins des hôpitaux qui doivent traiter les blessés de la face, la proposition pour fondée qu’elle soit est jugée irréaliste.Pour le ministre de la Guerre, l’organisation du service dentaire aux armées répond déjà, par l’emploi qui est fait de la ressource disponible, au mieux des besoins des combattants, rappelant à cette occasion que celle-ci est répartie entre la « zone de l’avant » et la « zone des étapes ». Dans la première, deux dentistes sont affectés à chaque groupe de brancardiers divisionnaires (56), et un troisième l’est à chaque groupe de brancardiers de corps. En outre, les corps d’armées sont pourvus d’un dentiste avec voiture dentaire automobile. Un dentiste a même été adjoint à chacune des six divisions de cavalerie encore constituées. Dans tous les régiments de l’armée française, médecins et infirmiers possèdent en théorie des instruments d’extraction dentaire et toutes les ambulances sont pourvues d’une boite spéciale pour les soins de stomatologie, permettant dans les deux cas de prodiguer les soins de première nécessité. Mais selon un dentiste affecté au groupe de brancardier divisionnaire de la 76e division, un praticien sur deux recourt encore à ses instruments personnels faute d’une dotation suffisante en trousse n° 6 (57).
Début 1916, dans les régiments, les ingrédients, les substances, les ciments et autres amalgames nécessaires aux infirmiers dentistes qui œuvrent sous la responsabilité du médecin, ne sont pas fournis par le service de santé, mais directement acquis sur les deniers du corps à raison d’une cinquantaine de francs par mois (58). Dans la « zone des étapes », c’est-à-dire en arrière du front, chaque centre hospitalier et chaque dépôt d’éclopés dispose d’un dentiste. Les armées possèdent en outre vingt-deux services de prothèses. Du fait des besoins en dentistes, la décision de les utiliser uniquement à l’exercice de leur art est maintenue un an plus tard, en dépit de la crise des effectifs : l’article premier de la loi du 10 août 1917, qui fait obligation à toutes les nouvelles recrues d’effectuer au moins un an au sein d’une unité combattante, en dispense par son article 2, les dentistes au même titre que les autres catégories de médecins (59). D’autre part, la pénurie de dentistes diplômés explique que lorsque le sénateur Charles Leblond propose que ceux âgés de plus de quarante ans, et aux armées depuis le début des hostilités, puissent faire une demande de relève pour l’intérieur, le ministre de la Guerre lui oppose un refus catégorique (60).
Trop cher pour le budget de la Guerre !
Mais la question des effectifs disponibles n’est pas le seul point d’achoppement. Début 1917, un praticien estime que l’ouverture d’un cabinet dentaire et d’un laboratoire par régiment, avec leurs frais de fonctionnement pour une année coûteraient 540 000 francs au budget de la Guerre (61). Mettre en place les mêmes équipements par division coûterait 290 000 francs. En outre, porter à 20 le nombre des voitures de stomatologie pour la zone de l’avant, avec tout ce qui est nécessaire à leur utilisation pendant un an, coûterait 560 000 francs. Le coût de mise en place et de fonctionnement pendant un an d’un service dentaire optimal sont donc évalués à près de 1,4 million de francs, une somme que le ministère de la Guerre ne peut consentir. Au reste, les armées ne disposent pas d’une ressource suffisante en médecins, notamment de médecins-dentistes, pour ouvrir autant de cabinets. Si bien que les pouvoirs publics promeuvent des solutions alternatives. Le commandement entend généraliser l’utilisation de la brosse à dent, d’autant qu’en 1916, une étude démontre que 90 % des hommes d’une région militaire n’utilisent toujours pas cet ustensile (62). Dans cet esprit, début 1916 le sous-secrétariat du service de santé militaire « publie un petit tract destiné à être largement distribué aux soldats de l’armée française. Il est illustré de vignettes explicatives et porte en sous-titre ces mots : "Pour la patrie, le soldat doit être aussi ménager de sa santé que généreux de son sang". » S’agissant de la propreté corporelle, le document recommande aux hommes de se brosser les dents après le repas, surtout le repas du soir avec une brosse imprégnée savon (63). D’autre part, la même année les affections et les pathologies les plus courantes rencontrées au front sont répertoriées dans un Guide médical destiné aux poilus. Les maux de dents et la fluxion dentaire y figurent en bonne place : « Voilà qui n'est pas rare l'hiver chez les soldats des tranchées. Ils n'ont pas toujours sous la main un dentiste, il est bon qu'ils sachent ce qu'ils peuvent faire pour se soulager. » (64).
L’ouvrage suggère donc de recourir à un gargarisme et donne deux compositions comprenant chacune de quatre à cinq ingrédients. Réunir ces derniers, autant qu’assurer leur dosage au gramme près, laisse pourtant entendre que pareilles formules ne peuvent pas être réalisées dans les tranchées de première ligne. Conscient de cette difficulté, le manuel propose comme autre solution de sucer des comprimés de chlorate de potasse que les poilus ont généralement sous la main, puisqu’ils leurs sont distribués pour purifier l’eau de boisson. Il conseille ensuite, « avec une épingle soigneusement flambée ou une brosse à dents bouillie [de] faire saigner la gencive à plusieurs reprises » (65). En cas de menace de phlegmon, il est recommandé de « faire une antisepsie plus efficace » (66). Mais les médications préconisées étant toutes aussi complexes à confectionner, les rédacteurs suggèrent aux soldats sujets à des rages de dents d’avoir déjà ces préparations dans leur sac et de recourir aux antinévralgiques. Pour les caries, il est recommandé de désinfecter et de faire un pansement à base de gutta-percha (67). Dans une guerre où les pouvoirs publics attendent beaucoup du soutien que l’« arrière » peut apporter aux combattants, le livre ne fait pas l’économie de deux pages d’une réclame attrayante, insérée hors pagination et vantant les mérites de la trousse dentaire de l’abbé Arnol, « un écrin solide et élégant, de dimensions réduites, contenant les six produits nécessaires pour guérir facilement soi-même en quelques minutes les maux de dents, fluxions, abcès, névralgies et toutes les maladies de la bouches. » Une autre pleine page est dédiée aux prescriptions d’emploi de la trousse miraculeuse, qui apparaissent bien plus faciles à mettre en œuvre que celles énoncées par les auteurs du Guide.
Une reconniassance tardive
Pendant toute la durée de la guerre, les « chicots », surnom que les poilus confèrent aux dentistes oeuvrant dans la zone des armées (68), ne s’occupent que de l’état bucco-dentaire des combattants. L’objectif est de leur assurer au quotidien une capacité suffisante de trituration des aliments et, à défaut, de pourvoir les nombreux édentés en prothèses et appareils. Le premier hommage rendu à leur travail, est constitué des nombreuses lettres dans lesquelles les hommes expriment leur soulagement et le confort que leur procure ces soins providentiels : « Heureusement qu’il y a un dentiste à la division, sans quoi je n’aurais pas fini de souffrir » (69). Les poilus victimes de graves blessures à la face où à la mâchoire, sont quant à eux évacués, lorsqu’ils sont transportables (70), vers les services de stomatologie et de chirurgie maxillo-faciales qui dès septembre 1914, se développent dans la zone de l’arrière. Ces spécialités, balbutiantes au début de la Grande Guerre, développent du fait de la multiplication des lésions, un champ de connaissance dont le docteur Frison, professeur à l’école dentaire de France et chef du centre de prothèses maxillo-faciale de la 6e région, dresse un bilan élogieux en 1917, assorti d’une bibliographie détaillée[ (71). Cet engagement des dentistes dans la guerre, tant dans les blocs opératoires qu’au plus près des combattants des tranchées, consacre la reconnaissance de leur art. Si bien qu’au moment de l’Armistice, un projet de loi présenté par Georges Clemenceau ministre de la Guerre, et lui-même docteur en médecine de formation, et Louis-Lucien Klotz, ministre des Finances, vise à modifier l’article 39 de la loi du 16 mars 1882 portant organisation de l’armée, pour conférer aux dentistes qui sont encore assimilés au « personnel-troupe » (72), un grade d’officier (73). Mais ce sont bien un décret du 11 janvier 1919, « déterminant la situation des dentistes militaires », et une instruction ministérielle signée le même jour par le sous-secrétaire d’État au service de santé, qui leurs font définitivement une place au sein des armées françaises (74).
(1) Chronique médicale, revue bi-mensuelle de médecine historique, littéraire et anecdotique, Paris, 1915, n° 22, p. 56.
(2) Règlement sur le service de santé de l'armée à l'intérieur. 4e édition, mis à jour jusqu'au 1er mai 1911, Paris, Lavauzelle, 1911.
(3) Troussaint, Ange-François-Cyprien, Direction du service de santé en campagne, directeurs et chefs de service dans les principales situations de guerre depuis la mobilisation jusque après la bataille, Paris, Lavauzelle, 1911.
(4) Bulletin officiel du ministère de la Guerre. Édition méthodique. Service de santé en campagne. Notices. Volume arrêté à la date du 15 septembre 1913, Paris, Lavauzelle, 1913.(5) Bulletin des loi de la République française, premier semestre 1882, Paris, Imprimerie nationale, p. 941.
(6) Émile Roger et Charles Godon, Code du chirurgien-dentiste, Paris, Ballière, 1893, p. 7.
(7) Paul Brouardel (1837-1906), doyen de la faculté de médecine de Paris, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des sciences.
(8) Cruet (docteur), Hygiène et thérapeutique des maladies de la bouche, Paris, Masson et Cie, 1899, p. 389.
(9) Ibidem, p. 390.
(10) Jean Château, Un Danger menaçant pour la santé publique, les erreurs et les préjugés populaires qu'il faut combattre, le remède dans les principales collectivités sociales, Grenoble, Lionel Dupont, 1905, p. 259.
(11) L’Odontologie, hebdomadaire, 30 octobre 1900, p. 358.
(12) Pierre Larousse, Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, français, historique, géographique, mythologique, bibliographique, littéraire, artistique, scientifique, etc., Tome 5, Contre-Czyz, Paris, Administration du grand dictionnaire universel,1869,, p. 728.
(13) Xavier Riaud, Première Guerre mondiale et stomatologie: Des praticiens d’exception. Paris, L’Harmattan, Coll. Médecine à travers les siècles, Paris, 2008.
(14) Siffre (docteur), Le service dentaire dans l’armée française, Tours, Allard, 1907, p. 21.
(15) Jean Château, op. cit., p. 224.
(16) Jean Château, op. cit.
(17) Le Monde dentaire, journal indépendant des chirurgiens-dentistes français, mensuel, n° 10, octobre 1907, p. 201.
(18) Bruno Péniguel, “L’histoire du corps des chirurgiens-dentistes des armées”, Médecine et armées, n° 5, décembre 2012, p. 471.
(19) Xavier Riaud, op. cit.
(20) Marcel Ségal, J.-J. Mailliu, De l’organisation des services odontologiques dans les armées de terre et de mer, Tours, Arrault et Cie, 1910, p. 6.
(21) Siffre (docteur), op. cit., p. 11.
(22) Ibid., p. 7.
(23) Jules D’Argent, L’œuvre des dentistes français pendant la guerre européenne, 1914-19…, septembre 1916, p. 7.
(24) Ibid.
(25) En dépit de la lettre du ministre de la Guerre du 5 mai 1913, Raoul Méquillet, député de la Meurthe-et-Moselle avait déposé un amendement tendant à faire bénéficier aux chirurgiens-dentistes, des dispositions applicables aux médecins, vétérinaires et pharmaciens. Sa proposition fut repoussée en séance du 18 juillet 1913. JORF, Débats parlementaires, 19 juillet 1913, p. 2740.
(26) Ibid., p. 27.
(27) Georges Villain, La nécessité des soins dentaires dans l’armée : quinze mois d’expérience, Paris, Mellotée, 1916, p. 4.
(28 Grenier, “Organisation d’un service dentaire dans un régiment d’infanterie”, Paris Médical, la semaine du clinicien, 1916, n° 19, Paris, Ballière et Fils, p. 578.
(29) J. Gardent, “Dans son cabinet roulant le dentiste opère aux armées”, La science et la vie, bimestriel, avril et mai 1916, p. 495.
(30) Escurré et Linsolas,“Les centres dentaires du front, expérience de vingt-six mois de campagne”, Congrès dentaire interalliés, novembre 1916, comptes rendus publiés par Georges Villain, Paris, Chaix, 1917, p. 1335.
(31) Bruno Péniguel, op. cit, p. 473.
(32) Paris Médical, la semaine du clinicien, 1915, n° 18, Paris, Ballière et Fils, p. 142.
(33) Armand Lévy, “Un service dentaire au front ”, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1303.
(34) Ibid., p. 1304.
(35) Lettres de Henri Barbusse à sa femme, 1914-1917, Paris, Flammarion, 1937, p. 169.(36) Georges Villain, op. cit., p. 2.
(37) Pandectes françaises périodiques, 1er et 2e cahiers mensuels 1915, Paris, 1915, Librairie générale de droit et de jurisprudence, p. 1002.(38) JORF, débat parlementaires, Chambre des députés, 21 août 1915, p. 1375.
(39) Georges Villain, op. cit., p. 2.
(40) Joseph Reinach, Rapport de la commission supérieure consultative du service de santé, Paris, 1915, Imprimerie des journaux officiels, p. 38 et 64.
(41) Joseph Reinach, Le service de santé pendant la guerre, Paris, 1915, Bloud et Gay, p. 105.
(42) Joseph Reinach, Rapport, op. cit., p. 64.
(43) Joseph Reinach, op. cit., p. 105.
(44) Gaumerais, “Le service dentaire dans la zone de l’avant”, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1318.
[45] J. Gardent, op. cit, p. 494 et 495.
[46] Gaumerais, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1319.
[47] Gaumerais, “Fonctionnement rationnel du service de stomatologie aux armées”, Paris Médical, la semaine du clinicien, 1915, n° 17, Paris, Ballière et Fils, p. 310.
(48) J. D’argent, op. cit., p. 15.(49) Guiard, “Fonctionnement du centre hospitalier de F…”, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1342.
(50) Le Gaulois, quotidien, 3 juillet 1916, p. 3.
(51) Henri Barbusse, Le Feu : journal d’une escouade, Paris, Flammarion, 1916, 378 pages, pp. 78 et 87.
(52) Paris Médical, la semaine du clinicien, 1917, n° 24, Paris, Ballière et Fils, 253 pages, p. 174.
(53) Le Progrès médical, 1917, p. 3. C’est le mode d’organisation qu’a adopté l’armée allemande. Le 73e régiment de fusiliers hanovriens qui, à l’automne 1915, possède sa base de repos à Douchy dans le Pas-de-Calais, a aménagé une infirmerie dentaire dans un abri de rondins. Ernst Jünger, Orages d’acier, Paris, Payot, 1930, réédition Livre de poche, 2014, p. 50.(54) Paris Médical, op. cit.
(55) Ibid.
(56) Décret du 2 mars 1916.
(57) Adrien Gaignon, “La pratique de l’art dentaire au front”, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1309.
(58) Grenier, op. cit., p. 578.
(59) Pandectes françaises périodiques – années 1918-1919, op. cit., tome 33e, p. 628.
(60) Paris Médical, la semaine du clinicien, 1917, n° 24, Paris, Ballière et Fils, p. 117.
(61) Gaumerais, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1321.
(62) Charles Mussat, “L’hygiène buccale dans l’armée”, Congrès dentaire interalliés, op. cit., p. 1323.
(63) Revue d’hygiène et de police sanitaire, Paris, Masson, 1916, p. 100.
(64) Le Guide médical (Bréviaire médical) du soldat, avec la collaboration de médecins spécialistes. Publié sous le patronage du "Vestiaire parisien", Au journal du médecin, Paris, 1916, p. 88.
(65) Ibid.
(66) Ibid.
(67) Ibid., p. 89.
(68) Albert Dauzat, L’argot de la guerre d’après une enquête auprès des officiers et soldats, Paris, Armand Colin, 1918, p. 153.
(69) Lettre du 4 février 1915 du soldat Joseph Papillon à ses parents. Marthe, Joseph, Lucien, Marcel Papillon, Si je reviens comme je l'espère: Lettres du front et de l'arrière, 1914-1918, Paris, Grasset, 2003.
(70) Les « intransportables » sont dirigés vers les centres de chirurgie et de prothèses maxillo-faciales d’Amiens et Châlons-sur-Marne. L. Frison, “La stomatologie pendant la guerre”, Paris Médical, la semaine du clinicien, 1917, n° 25, Paris, Ballière et Fils, p. 192.
(71) Ibid., p. 190.
(72) Paris Médical, la semaine du clinicien, 1917, n° 24, Paris, Ballière et Fils, p. 117.
(73) Paris Médical, la semaine du clinicien, 1917, n° 24, Paris, Ballière et Fils, p. 286.
(74) Journal officiel de la République française du 19 janvier 1919 et Bulletin législatif Dalloz 1919, Paris, Dalloz,1920, pp 20 et 21.
Extrait de la dépêche ministérielle du 8 février 1916 relative au matériel nécessaire dans le cabinet d'un opérateur dentaire au front
Fauteuil (A) 1, Crachoir (B) 1, Tour de cabinet 1, Fraises diverses 1 (grosse), Fraises à racines 3, Pièce à main 1, Angle droit 1, Excavateurs (gauche et droit) 6 de chaque côté, Fouloirs à amalgame 3, Fouloirs ou spatules à ciment et gutta 2, Spatule à ciment 1, Ciseaux à émail 2, Miroirs buccaux 6, Manche pour miroir 1, Poire à air chaud 1, Précelles 1, Sondes à canaux 2 douzaines, Tire-nerf 1 douzaine, Mortier pour amalgame 1, Limes à séparer 1 douzaine, Meules carborendum 3, Mandrins pour moules et disques 5, Disques à polir 250, Seringue hypodermique 1, Aiguilles interchangeables 3 douzaines, Daviers 1 jeu, Élévateurs 1 jeu, Brûleur ou lampe à alcool 1, Thermo-cautère (cet appareil existant dans toutes les formations sanitaires, il n'y a pas lieu d'en faire mention et encore moins d'en pourvoir le Service dentaire, cet appareil pouvant être commun à tous les Services, vu son prix élevé).
(A) Pour le fauteuil, on pourrait utiliser les fauteuils de coiffeurs auxquels il suffirait de fixer une têtière ; le tout serait d'un prix bien inférieur au moindre fauteuil vendu par les fournisseurs pour dentistes.(B) Le crachoir peut être confectionné avec une boîte ou un récipient en tôle émaillée, surmontée d'un entonnoir également en tôle émaillée, le tout d'un prix très modique et bien inférieur à celui des crachoirs en cuivre nickelé avec entonnoir en verre, qu'on trouve dans le commerce, mais qui n'existent pas en quantité suffisante. Du reste il en est de même pour les articles ci-dessus.
ENCADRÉ 2 (ATTENTION À LA PRÉSENTATION)
Instruction sur l'organisation des services de stomatologie dans les régions
Ministère de la Guerre Paris, le 8 février 1916.
N° -2054 3/7.
Les cabinets dentaires et les centres de prothèse élémentaire pour édentés étant appelés à prendre de plus en plus d'extension dans les régions, il y a lieu, dans l'intérêt du Trésor, de réduire autant que possible les dépenses provoquées par l'installation de ces centres, tout en assurant cependant les besoins de leur fonctionnement normal.
A titré d'indication, j'ai l'honneur de vous envoyer ci-joint deux listes comprenant : l'une, le matériel nécessaire pour le fonctionnement d'un cabinet dentaire (A) ; l'autre le matériel nécessaire pour un atelier de prothèse de 1 à 5 mécaniciens.
En communiquant ces listes aux dentistes de votre région, vous voudrez bien les inviter à tenir compte autant que possible, dans leurs demandes, des suggestions qui y sont contenues, en leur faisant observer qu'elles ont été établies, non sur des données théoriques, mais sur des données pratiques tirées de l'expérience acquise par l'examen du fonctionnement d'un certain nombre de centres.
D'autre part, un certain nombre d'édentés inaptes, lorsqu'ils ont été appareillés, détériorent ou rejettent leur appareil dans le but d'être évacués de nouveau sur un centre dentaire ou d'échapper aux obligations du service de l'avant auquel ils ont été rendus.
Afin de permettre de prendre toutes les mesures utiles contre cette manière de faire, vous voudrez bien dorénavant, prescrire qu'une fiche du modèle ci-joint soit établie pour chaque édenté appareillé ; fiche qui sera apposée sur le livret individuel de l'homme.
Pour le sous-secrétaire d'État et par son ordre :
Le directeur-adjoint,
Signé : ILLISIBLE.
(A) Cette liste a été reproduite dans l'instruction 8119 3/7du 9 juin.
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