Situé en lisière du Bois de Boulogne, ce stade construit pour la finale de la coupe Davis 1928 accueille chaque année le plus important tournoi de tennis sur terre battue au monde.
François Artigas
Contrairement à une idée reçue, Roland Garros n'est pas un joueur de tennis, mais un sportif particulièrement éclectique puisqu’il pratiqua avec un égal bonheur le cyclisme et le rugby, même si c’est comme aviateur qu’il connaîtra une renommée planétaire. Dès 1911, il bat le record d’altitude et, en décembre 1912, il est le premier aviateur à relier deux continents : l’Afrique à l’Europe. Mais son exploit le plus retentissant, il l’accomplit le 23 septembre 1913 en réussissant la première traversée aérienne de la Méditerranée en 7 h et 53 min. Parti de Fréjus sur un Morane-Saulnier, il s’oriente à la boussole, connaît deux pannes pour arriver à Bizerte avec seulement cinq litres d’essence dans le réservoir de son monoplan ! À son retour en France, il est accueilli en héros et devient logiquement, après la déclaration de la Première Guerre mondiale, pilote de guerre. Il est tué le 5 octobre 1918 lors d’un combat aérien, il allait avoir 30 ans !
Afin d’honorer sa mémoire, il est décidé de donner son nom au stade de tennis qui sera construit, en bois, sur un terrain du Stade français, durant l'hiver 1927-1928 afin d'y accueillir la finale de la coupe Davis 1928. C’est Émile Lesieur, international de rugby et condisciple de Roland Garros dans la promotion 1908 de HEC, qui imposera le nom de son ami aviateur pour appeler le stade de tennis qui sera construit. En 1928, ce que d'aucuns considèrent comme la Mecque de la terre battue s’étend sur 3,25 ha et comporte cinq courts, dont le plus grand, le Central court, peut accueillir jusqu'à 10 000 spectateurs.
Un camp pour les étrangers
Au début de la Seconde Guerre mondiale, le stade est réquisitionné par les autorités allemandes d'occupation qui le transforment en camp de transit pour les étrangers jugés indésirables sur le sol français. Ces derniers seront parqués sous le Central.
Mais dès 1941, le tennis y reprend ses droits et les Internationaux de France sont rebaptisés pour l'occasion « tournoi de France ». Car seuls les Français et quelques joueurs francophones sont invités à disputer cette compétition tronquée. Bernard Destremeau la remporte en 1941 et 1942 avant d'aller combattre sur le front dans l'Armée française de Libération. À noter que le nom des lauréats de ces années n’apparaîtra jamais au palmarès officielle de la compétition.
Naissance du court N°1
Durant les trente années suivantes, aucun chantier d’importance n'y sera réalisé. En 1979, le Court n°1 voit le jour sur l'emplacement de deux courts. Il peut accueillir 4 500 spectateurs et sera détruit très exactement quarante ans plus tard à l’issue de l’édition 2019 du tournoi. Au début des années 80, le stade Roland-Garros s’agrandit et passe alors sur 5,7 ha. Neuf nouveaux courts y sont construits. Les travaux sont évalués à 32 millions de francs, soit environ 5 millions d’euros.
Entre 1987 et 1991, la tribune B haute du Court central est détruite et reconstruite. C'est sous l'impulsion de Philippe Chatrier, alors président de la Fédération française de tennis, ancien journaliste et patron de presse, qu'un centre des médias ultramoderne organisé sur trois niveaux est créé. Devant l'importance croissante des télévisions qui retransmettent le tournoi, vingt-huit cabines pour les commentateurs télé sont installées au sommet de la tribune C. Entre-temps, la place des Mousquetaires est aménagée en 1989 avec la pose des statues en bronze des quatre « héros » du tennis français, Jean Borotra, Jacques Brugnon, Henri Cochet et René Lacoste. Elle est l'œuvre du sculpteur italien Vito Tongiani. En 2011, la société Lacoste décide dans le cadre d'un événement publicitaire de revêtir durant la durée du tournoi les statues de polos de sa marque. L'artiste en prend ombrage et décide de saisir la justice qui lui accordera, en guise d'indemnisation, la somme de 12 000 euros alors que le sculpteur en réclamait... 500 000 !
Suzanne Lenglen honorée
L'extension du stade programmé au début des années 90 comprend la construction de sept courts en terre battue supplémentaires, portant leur nombre total à vingt-trois. Le coût de ces travaux, qui ont duré de 1992 à 1994, s'élève à 230 millions de francs (35 millions d'euros). La superficie du stade est alors de 7,9 ha.
En 1994, un Central bis de 10 000 places est construit. Il est appelé « court A » jusqu'à ce qu'il prenne en 1997 le nom de la Française Suzanne Lenglen, première star internationale du tennis féminin. Surnommée « la Divine », elle s'imposera six fois à Roland-Garros et autant de fois à Wimbledon, remportant la médaille d'or des Jeux de 1920 organisés à Anvers. C'est encore, aujourd'hui, le plus beau palmarès du tennis féminin français.
Un Central plus confortable
Après l'édition 1999 du tournoi, Le changement le plus notable est le réaménagement du Central avec les tribunes A et D du court qui sont détruites pour être reconstruites, augmentant le confort mais réduisant sa capacité d'accueil, qui passe de 16 500 à 15 000 places. Les travaux de la tribune D sont contemporains de la création de locaux administratifs pour la Fédération française de tennis (FFT) qui y établit son siège. Le 25 mais 2001, le Court central prend le nom de Philippe Chatrier, en hommage à ce grand dirigeant du tennis mondial décédé un an plus tôt. Entre 2004 et 2008, la tribune C, qui n'a pas été modifiée depuis la construction du central près de quatre-vingts ans plus tôt, est détruite et reconstruite. La galerie B du court Philippe-Chatrier est rénovée.
Au début des années 2010, les Internationaux de France manquent de place, tant il est vrai qu'avec moins d'une dizaine d'hectares, le site est notoirement plus petit que ceux des autres tournois du Grand Chelem (Open d'Australie, Wimbledon et l'US Open), dont la superficie est comprise entre 18 et 20 ha. Dès lors, la FFT envisage plusieurs solutions d'extension du stade dont la délocalisation du tournoi sur un autre site en Ile-de-France : les villes de Gonesse, Versailles et Marne-la-Vallée sont candidates. Une idée qui est loin de séduire les habitués de la Porte d'Auteuil et sera, au soulagement des puristes, vite abandonnée.
Un projet d'extension du stade est finalement adopté par la ville de Paris et la Fédération française de tennis. Ce projet, qui inclut la construction d'un nouveau court dans les Serres d'Auteuil, fait l'objet de vives contestations de la part d'associations de défense des monuments historiques qui seront déboutées. En 2016, les travaux sont finalement engagés, permettant l'extension progressive du stade et l’ouverture des courts 7, 9 et 14 pour l'édition 2018. Pour celle de 2019, on reconstruit le Central (voir encadré) et on ouvre le court Simonne-Mathieu. Ce nouveau court à l'architecture semi-enterrée, construit dans les serres d'Auteuil, aura fait couler beaucoup d'encre. Il porte le nom de la championne de tennis des années 30 ayant remporté pas moins de treize titres en Grand Chelem, dont deux en simple à Roland-Garros. Simonne Mathieu, décédée à Chatou en 1980 à l'âge de soixante et onze ans, reste la deuxième Française la plus titrée de l'histoire du tennis derrière une certaine… Suzanne Lenglen !
Un village new-look
Depuis le début des années 80, le village caché à l'abri des regards indiscrets se trouvait niché dans un coin du stade, a proximité du court n°1. Il est désormais implanté dans un imposant bâtiment en forme de cube agencé sur trois niveaux. Situé juste à côté du court Philippe-Chatrier, cet édifice construit en terrasses autour d'un patio fait face au Bois de Boulogne. C'est l'endroit où il faut être vu et voilà pourquoi durant la quinzaine de très nombreux peoples s'y pressent. Ce nouveau village, conçu à la différence de l'ancien avec un long couloir en forme de T, comprend plusieurs niveaux qui sont reliés entre eux par des escaliers et des ascenseurs. Une configuration qui permet aux invités d'avoir une vue directe sur deux courts. Le nouveau village dispose de dix-sept loges pouvant accueillir chacune d'entre elles entre 50 et 100 personnes par jour pour le déjeuner. Dans l'ancien village, pour aller assister aux matchs, il fallait quitter celui-ci et traverser en partie le stade pour accéder au Central ou au Suzanne Lenglen. Ce qui n'était pratique pour personne !
Appelé à recevoir les épreuves de tennis et de boxe anglaise des Jeux de 2024 ainsi que les compétitions de tennis, rugby et basket fauteuil des Jeux Paralympiques prévus cette année-là, il était impératif d'équiper un deuxième court d'un toit pour protéger les compétiteurs en cas d'intempéries. Ce sera chose faite en 2023 avec la pose d'un toit sur le court Suzanne-Lenglen. Dès lors, Roland-Garros n'aura plus rien à envier aux autres sites qui abritent les tournois du Grand Chelem. Et ce ne sont pas les très nombreux fans de la petite balle jaune qui s'en plaindront.
En quelques chiffres…
12 comme le nombre de victoire de l’Espagnol Rafael Nadal Porte d’Auteuil. Il a été le premier joueur de l’histoire à remporter douze fois le même tournoi du Grand Chelem ;97,9 comme pourcentage record de matchs gagnés à Roland-Garros par ce même Rafael Nadal. Soit quatre-vingt treize victoires pour seulement deux défaites !263, comme le nombre de ramasseurs de balles garçons et filles, âgés de 12 à 16 ans, qui ont officié sur les courts de la Porte d'Auteuil durant l'édition 2019 du tournoi ;1983, comme la dernière année où un Français a remporté le simple messieurs du French Open. Il s’agit de Yannick Noah qui a battu, cette année-là, le Suédois Mats Wilander 6/2, 7/5, 7/6 ;30 268, comme le nombre total de places assises disponibles sur les trois principaux courts : Philippe-Chatrier, Suzanne-Lenglen et Simonne-Mathieu ;519 901, comme le nombre record de spectateurs venus assister du début des qualifications à la finale du simple messieurs. Il a été établi lors de l’édition 2019.
F.A.
Un autre Central
Vaisseau amiral du tournoi, le Court central Philippe-Chatrier a été en grande partie rénové pour l’édition 2019 du French Open. Après dix mois de travaux, il s’est vu doter d’une nouvelle tribune et, si sa capacité d’un peu plus de 15 000 spectateurs est quasiment la même, c’est au niveau du confort que la différence est la plus spectaculaire. Il offre désormais une meilleure visibilité au public et des sièges plus espacés en bois clair des Vosges permettent aux spectateurs d’être mieux assis. Mais la grande transformation est pour les éditions 2020 et 2021. Avec, dès cette année, l’installation de ce fameux toit rétractable d’un poids équivalent à celui d’une demie tour Eiffel avec pas moins de 47 323 pièces métalliques pour la structure en acier. Un toit qui devrait assurer le bon déroulement des matchs en cas de pluie et permettre, à partir de 2021, l’instauration de sessions en soirée. C'est au mois de février dernier que la onzième et dernière aile du toit a été posée. Un court central qui, en deux ans, aura été reconstruit à 80 % !
F.A.
En septembre !
Ce que n'avait réussi à faire ni la grippe asiatique (déjà partie de Chine et qui à l'automne 1957 avait contaminé près de 10 millions de Français dont 15 000 décèderont), ni celle de Hongkong (en 1968 avec ses plus de 31 000 morts recensés uniquement dans l'Hexagone), la Covid-19 y est parvenue ! Initialement prévu du 24 mai au 7 juin 2020, le plus grand tournoi de tennis au monde sur terre battue se disputera finalement, sauf si bien entendu la pandémie se poursuit l'automne prochain, du 20 septembre au 4 octobre de la même année. Ainsi en a décidé le mercredi 18 mars 2020 la Fédération française de tennis, organisatrice du tournoi. Un French Open qui devrait ainsi débuter une semaine seulement après la fin de l'US Open appelé comme chaque année à se disputer à la fin de l'été à New York. Un report qui ne fait toutefois pas l'unanimité parmi les organisateurs d'autres épreuves ATP (hommes) et WTA (femmes). Certains tournois, plus modestes, se disputant traditionnellement à cette période voient d'un très mauvais œil le mastodonte parisien qui réunira les meilleures joueuses et les meilleurs joueurs de la planète venir empiéter sur leurs propres dates ! Pour l'anecdote, Rafael Nadal, qui avait pris l'habitude de fêter son anniversaire en deuxième semaine du tournoi parisien – il est né le 3 juin 1986 à Manacor, en Espagne –, devra attendre l'édition 2021 pour de nouveau envisager de souffler ses bougies Porte d'Auteuil.
F.A.
Stade Roland-Garros 2 avenue Gordon Bennett 75016 Paris. Tél. : 01 47 43 48 00.Date de Construction : 1928.Siège : Fédération française de tennis (FFT), présidée par Bernard Giudicelli depuis le 18 février 2017.Organisation : Internationaux de France de Tennis (French Open), c'est l'un des quatre tournois du Grand Chelem avec l'Open d'Australie, Wimbledon et l'US Open. Il se dispute sur terre battue.Directeur du tournoi : Guy Forget.
F.A.
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