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Stéphane Rotenbergun enfant de la télé et de Paris


Quinze ans de Pékin Express au compteur, dix ans aux fourneaux de Top Chef, Stéphane Rotenberg est un animateur phare de M6. Mais à 52 ans, cet enfant de la télé a d’abord été un enfant de Paris. Le présentateur, plutôt réservé, s’anime pour évoquer avec passion la ville de son enfance et son ancrage au bord de la Seine...

Propos recueillis par François Viot




« Vous le natif de Lens, quels sont vos premiers souvenirs à Paris ?

Sacha Guitry disait : « Être parisien, ce n’est pas être né à Paris, c’est y renaître ! » J’y suis arrivé à l’âge de deux ans et demi et j’y suis né de nouveau. À l’orée des années 70, ma petite enfance se passe dans le 20e arrondissement et j’ai des souvenirs extrêmement précis de la rue Pelleport et de mon école maternelle place Gambetta, en pierre de taille, avec sa cour carrée et ses chênes au milieu. Quand on est petit, l’univers se réduit à quelques rues...


Vous aviez sûrement des terrains d’aventure où vous jouiez comme dans La Guerre des boutons...

Jusqu’à neuf ans, j’étais très casanier, j’adorais être chez moi. Je me mettais à la fenêtre et je regardais la rue. Je pouvais faire ça pendant des heures, surtout le matin. À l’époque, les programmes télé ne commençaient qu’à midi. J’étais fasciné par la circulation automobile, je connaissais toutes les marques de voitures. En face, une tête de cheval d’une boucherie chevaline sortait du mur. Cela suffisait à alimenter mon imaginaire.


En 1976, vous quittez Paris pour la banlieue. Est-ce un déchirement ?

Mes parents, poussés par les nécessités économiques, sont partis à Champs-sur-Marne (Seine-et-Marne). Mais nous ne pouvions pas concevoir nos loisirs ailleurs qu’à Paris. Dès que nous allions au cinéma ou au restaurant, nous y revenions. À dix ans, tous les mercredis avec ma mère, nous prenions le RER A. C’était d’une modernité folle à la fin des années 70, on se croyait en Amérique. Ma banlieue bétonnée ne me faisait pas rêver. Puis ma mère m’a offert une glace au Drugstore. Et on allait au cinéma boulevard des Italiens. On faisait la queue pour voir les plus grandes stars de l’époque, les derniers Belmondo, de Funès ou James Bond.

Vous n’êtes pas comme un grand nombre de banlieusards qui méconnaissent Paris...

Je connais très bien Paris, mon père était représentant. Je n’ai pas besoin de GPS pour me déplacer. Mon oncle était commerçant de fringues dans le 14e arrondissement, à la porte d’Orléans. Ma grand-mère habitait Alésia et ma cousine était étudiante à la Cité U. C’est un endroit incroyable avec ses pavillons. Je m’y perdais...


Pour votre premier appartement, vous revenez à Paris...

J’ai beaucoup déménagé, vingt fois, au gré de la vie et de l’évolution de mes moyens mais j’ai toujours habité Paris. Mon premier appartement se situait dans le 16e arrondissement, près de la Maison de la radio, puis j’ai habité près du parc Monceau dans le 8e. Désormais animateur, même si je loue un bel appartement rue du faubourg Saint-Honoré, à deux pas de l’Élysée, avec vue sur la place de la Concorde, je suis retourné en banlieue. Cette notion du périphérique infranchissable n’existe pas pour moi. Depuis longtemps, j’ai conceptualisé le Grand Paris.


Vous aimez bien les beaux quartiers...

J’aime les quartiers un peu endormis, les belles allées... Depuis l’âge de quatorze ans, j’adore Sacha Guitry. Je vais souvent rue Élysée-Reclus où son père Lucien avait un hôtel particulier. C’est là que Sacha Guitry est mort. Il n’avait pas d’héritier, tout a été détruit et il ne reste que le buste de son père. Cette rue du Champ-de-Mars me faisait rêver.

Vous vivez au bord de la Seine. Que représente-t-elle pour vous ?

C’est vrai, ma maison est au bord de la Seine. Et je travaille sur la Seine [ses bureaux sont situés dans une péniche]. J’adore ça. Il y a une énergie incroyable. Cette masse d’eau qui se déplace, qui monte, descend et qui n’est jamais la même. C’est incroyable... Le fleuve offre des fulgurances incroyables. Je me promène en bateau. En allant vers l’ouest, on rencontre une alternance de sites naturels et industriels. Des endroits bucoliques et des parkings avec cinq cents voitures. On y construisait la 2 CV. Céline décrit une Seine très poisseuse, polluée. Heureusement, cela a changé.


Vous avez un projet d’aménager une péniche pour accueillir des événements...

Oui, j’aimerais la transformer sur le modèle des bateaux Riva, tout en bois, pour recréer le principe des yachts clubs de plaisance. Paris ne tourne pas le dos à la Seine comme certaines villes tournent le dos à la mer. Mais elle n’en fait pas son centre, comme Londres et la Tamise. Cela devrait être un axe de communication pour relier Paris à sa banlieue, un endroit de vie pour y travailler et y accueillir des entreprises. Pour les JO de 2024, qui auront lieu à Paris, ce serait fantastique.


Vous êtes un fou de vieilles voitures. Où en êtes-vous de votre collection ?

J’ai tout revendu, je garde une Ford Mustang avec laquelle j’aime batifoler. Mais pour paraphraser Philippe Bouvard, j’ai eu cent voitures et sans regrets... J’en ai eu plus de cent mais c’est sans regret.


La chasse à la voiture polluante, vous en pensez quoi ?

Je reconnais que les temps changent. Je roule en Smart... Mais même s’il faut restreindre la circulation de ces voitures polluantes, il faut chérir ce patrimoine industriel, témoin du génie français. Il ne faudrait pas qu’il arrive la même chose qu’avec les archives du cinéma muet qui ont presque entièrement disparu.

Un mot sur Top Chef, dont c’est la onzième édition... Quoi de neuf ?

Le thème majeur, c’est l’audace. L’an dernier, pour les dix ans, on est allé au maximum de l’excellence. On a eu les plus grands chefs étoilés. Cette année, on a voulu que les candidats bousculent les codes. Paul Pairet, le nouveau membre du  jury, élu meilleur restaurateur du monde en 2018, est un chef qui aime les candidats un peu décalés, pas vraiment académiques.


Avez-vous l’habitude de fréquenter les restaurants parisiens de vos chefs et candidats ?

Oui j’essaie d’aller dans leurs restaurants mais mes soirées libres ne sont pas assez nombreuses. Je ne suis pas allé chez Victor Mercier un finaliste de Top Chef 2018. Il a ouvert un restaurant Fief (dans le 11e arrondissement), fait uniquement avec des ingrédients produits en France. Cela veut dire : pas de café, de chocolat, de poivre... Et en hiver, des poires, des pommes, du rutabaga... Et cela marche ! Mais je n’ai pas de cantine, je garde mon rôle neutre, je ne veux vexer personne.


Passons à Pékin Express. Ce retour à la course mythique a-t-il été aussi galère qu’à ses débuts ?

Oui ce n’était pas plus facile. Les gens ont davantage l’habitude de voir des étrangers mais c’est toujours aussi compliqué en termes d’autorisations. Les candidats ont été régulièrement arrêtés. Mais avec les habitants, cela s’est bien passé. Ceux qui ont accepté de nous aider, étaient incroyables.


En dehors de ces deux formats forts que sont Pékin Express et Top Chef, avez-vous d’autres projets ?

Non, ce sont d’énormes machines qui prennent beaucoup de temps. C’est très difficile de caser une quotidienne ou une hebdo en plus. J’aimerais refaire de la radio mais, en France, elle marche surtout en direct sauf peut-être le week-end. Et de septembre à la mi-novembre, du matin au soir, je suis sur Top Chef et pendant cinquante jours en tournage avec Pékin Express. Si je dois signer deux cent vingt émissions par an, je me vois mal dire au patron de RTL par exemple [propriété de M6] de m’en retirer quatre-vingt dix...


Vous avez l’habitude de dire, à votre retour, que vous en avez assez de Pékin Express puis l’envie revient au départ... Est-ce la même chose quand vous partez de Paris ? La capitale vous manque-t-elle ?

C’est la France qui me manque davantage que Paris. L’art de vivre français. Mon périmètre se réduit à la France même si cela fait cinquante ans que j’habite Paris... Je pourrais même vivre à l’étranger mais il me faudrait de temps en temps un piqûre de rappel à base de fromages ! »


Son « Paris Express »

L’animateur de Pékin Express nous a donné, avant de s’envoler pour une nouvelle course programmée sur M6 cet été, ses lieux incontournables à Paris.


Le canal Saint-Martin et le port de l’Arsenal : « Ils vont être réaménagés. Découvrir Paris par ses canaux est un enchantement. Les gens qui vivent sur de petits bateaux de 15 m dans ce port près de la Bastille sont dans un petit coin de paradis. Cela risque de changer. »


Le cimetière du Père-Lachaise : « C’est comme une évidence. Il y a mille manières de le visiter. Il y a quelques années, j’ai réalisé un sujet sur les grands du monde culinaire qui y sont enterrés. Parmentier, Escoffier y ont leurs tombes... »


La rue des Rosiers : « Elle n’est plus ce qu’elle était mais ce quartier historique est important pour ma famille. Il a beau être bobo avec ses boutiques design. J’en garde le souvenir de mon enfance. »


La rue des Écoles : « À côté de la Sorbonne, mon cousin y tenait un salon de coiffure. Je venais m’y faire couper les cheveux. Le hasard veut qu’il y ait dans cette rue dix boutiques du Vieux Campeur où je viens acheter quantité d’articles pour mes Pékin Express. »


Le Paris d’Hector Guimard : « Cet architecte a donné à Paris ses stations de métro art nouveau mais il a aussi construit des logements populaires de qualité, notamment dans le 16e arrondissement. »


Le Grand Palais : « C’est un lieu marqué par l’automobile. Le Salon de l’auto s’y tenait avant la porte de Versailles. Le général de Gaulle et Pompidou sont venus de nombreuses fois l’inaugurer. J’adore regarder ces images en noir et blanc. »


Levallois-Perret : « J’habite désormais cette ville. À l’époque, tous les artisans automobiles y étaient installés à proximité des usines. Ils ont été fracassés dans les années 60-70. Mais il reste encore quelques vestiges de ce patrimoine industriel. »


Les boucles de la Seine : « Les impressionnistes les ont aimées avant moi. Cette sortie dans Paris par l’ouest est incroyable. On traverse des ports de stockage, des banlieues laborieuses. Et après quelques écluses, on arrive aux falaises de craie de La Roche-Guyon et des Andelys. »


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