19e arrondissement
L’arrondissement des Buttes-Chaumont se situe au nord-est de la capitale, limité aux portes d’Aubervilliers, de Pantin, du Pré-Saint-Gervais et des Lilas. Ses quatre principaux quartiers – La Villette, le Pont-de-Flandre, Amérique et Combat – ont été extrêmement marqués par son passé industriel et portuaire, l’arrondissement tendant aujourd’hui à retrouver un aspect plus naturel et paisible.
Les transformations de La Villette
Le quartier s’est développé sur l’ancienne commune éponyme. Sous l’Antiquité, le village gallo-romain se situe sur la voie qui mène en Flandres et est traversé par la route du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. Au bas Moyen Âge (849), un hôpital puis une villa (ou villette) est destinée à accueillir les religieux retraités ou malades. Des terrains servent alors de pâturages et sont utilisés pour y cultiver du blé et de la vigne. Les Parisiens y font construire des maisons de campagne et viennent s’y reposer loin de l’effervescence de la capitale. Le mur des Fermiers généraux (vers 1785) sert de frontière avec la capitale avec les barrières des Vertus (actuellement rue d’Aubervilliers), de La Villette (avenue de Flandre), de Saint-Martin (la rotonde de La Villette) et de Pantin (avenue Jean Jaurès).
On décide, sous le Premier Empire, du réaménagement de cette zone afin d’y créer le canal de l’Ourcq et le bassin de La Villette qui sera inauguré en 1808, puis le canal Saint-Denis en 1821. C’est donc à cette période que le village, d’aspect campagnard, se transforme avec les activités industrielles et portuaires ainsi que l’arrivée du chemin de fer en 1849 et de la Petite Ceinture en 1854. La commune se trouve rattachée à Paris dans sa majeure partie par l’enceinte de Thiers dans les années 1840 et entièrement annexée en 1859.
Le quartier de La Villette se distingue actuellement par le réaménagement complet de ses anciennes structures et par le bassin, devenu lieu de promenade incontournable. Depuis 1808, il s’agit du plus grand plan d’eau artificiel de Paris, reliant le canal de l’Ourcq au canal Saint-Martin. Le premier bassin, long de 700 m et large de 70 m, a été créé pour plusieurs usages dont celui de réserve d’eau potable mais vise également à retenir suffisamment d’eau pour la navigation des autres canaux parisiens. Lors de l’épidémie de choléra de 1832, les Parisiens qui ont utilisé l’eau de La Villette ont été moins malades que les autres habitants, qui devaient se contenter de cours d’eau très polluées.
Lors de son inauguration, c’était un lieu de promenade estival, aménagé en espace de patinage l’hiver. Au cours de l’industrialisation de la ville au début du Second Empire, les espaces verts ont été vendus aux industriels qui y ont implanté des dépôts de marchandises. L’activité industrielle n’a cessé de se développer et le bassin a été agrandi afin de couvrir les besoins du transport fluvial qui s’était également densifié en Seine-Saint-Denis. À cette époque, l’activité économique du bassin de La Villette est alors si importante qu’elle est comparable à celui du port de Bordeaux. Aujourd’hui, comme la plupart des canaux parisiens, il retrouve sa fonction de loisirs puisque l’été, des guinguettes s’y installent ainsi que, depuis peu, une extension de Paris Plage. La course “la traversée de Paris à la nage”, lancée en 1905, a failli être remise au goût du jour en 2012 mais la préfecture a refusé d’accorder son autorisation pour des motifs de sécurité. Cependant, régulièrement, les Parisiens peuvent s’y baigner.
Le quartier Pont-de-Flandre
Avec le pont du même nom qui traverse le canal Saint-Denis, ce quartier naît en 1859. Il se caractérise principalement par son histoire fortement liée aux anciens abattoirs de la ville de Paris, aujourd’hui espaces de loisirs. Il a fallu attendre le xixe siècle pour que les abattoirs soient créés dans la capitale. Depuis le Moyen Âge, c’était principalement la corporation de la « Grande boucherie » qui régissait les activités bouchères. Très puissante, elle intervenait dans la politique (comme par exemple lors de la révolte des Cabochiens). La « Grande boucherie »possédait plusieurs centres d’abattage à l’intérieur même de la ville. Les écrits témoignent de l’horreur subie par les animaux et de la saleté qu’il y règne aux alentours. La Boucherie du Parvis-Notre-Dame est l’une des premières et a été transférée à Châtelet au viiie siècle. C’est sous Napoléon, en 1806 qu’un décret décide de la création de cinq tueries, financées par le ministère de l’Intérieur. Les abattoirs de Grenelle, Ménilmontant, Montmartre, du Roule et de Villejuif sont inaugurés en 1818, interdisant par conséquence l’introduction d’animaux dans la capitale.
En 1859, il est décidé de la construction d’une structure unique à La Villette, proche du canal de l’Ourcq, qui s’étendra dans un premier temps sur 39 ha (puis 54). C’est le 1er janvier 1867 que ces abattoirs sont remplacés par l’abattoir général de La Villette. Rassembler les activités bouchères au sein d’une même structure permet l’éloignement de la cruauté des yeux des Parisiens, évite la pollution olfactive et permet d’établir une règlementation sanitaire. Face à la création d’une structure unique et contrôlée qui rend les prix plus élevés, est mise en place de manière illégale « la viande foraine ». Les animaux malades sont ainsi tués en périphérie et revendus alors même que cette viande est interdite.
C’est Jules de Mérindol, élève de Victor Baltard, qui est en charge des plans de la plupart des bâtiments. L’endroit est bien desservi, par la gare de Paris-Bestiaux et par celle de Paris-Abattoirs. Au début du xxe siècle, des fêtes ont régulièrement lieu, tel le défilé du Bœuf Gras qui connaît un grand succès.
En 1949, on juge les abattoirs trop vieillissants et un plan de reconstruction est prévu. Les frais sont énormes et le scandale de La Villette explose au début des années 1970. Le site, qui occupe désormais 54 ha, cesse toute activité en mars 1974. Seule la grande halle de La Villette, le pavillon de la Bourse, la fontaine aux Lions de Nubie et quelques autres structures sont conservées. De nombreux appels à projets sont lancés et la Cité des sciences et de l’industrie ouvre en 1986. Puis de nombreux lieux d’études et artistiques seront créés : Cité de la musique, Zénith de Paris, Cabaret Sauvage et Philharmonie.
Architectures d'Amérique
À côté de la populaire place des Fêtes et de ses tours se situe la tranquille rue de Mouzaïa. Ce quartier était autrefois très fréquenté et animé car s’y trouvaient les anciennes carrières d’Amérique. On y exploitait le gypse que l’on utilisait pour bâtir les immeubles de la capitale. Une partie de l’extraction était exportée aux États-Unis. On y extraiyait également la pierre meulière qui sert pour la construction des maisons et des villas bourgeoises.
Tout au long du xixe siècle et jusqu’aux années 1930, les architectes utilisent cette pierre à Paris (puis dans des carrières avoisinantes) pour des raisons esthétiques mais aussi pratiques. La meulière est une roche siliceuse qui constitue un solide matériau de construction, imperméable, et qui a la particularité d’être un bon isolant thermique et acoustique. Il existe de nombreux gisements de meulières dans la périphérie de la capitale mais l’extraction coûte cher et on privilégie d’autres matériaux moins onéreux par la suite. La plus grande carrière est exploitée à ciel ouvert et, après sa fermeture, on la transforme en parc, celui des Buttes-Chaumont (dans le quartier du Combat).
Un certain nombre d’usines se sont implantés dans le quartier d’Amérique. Il y a aussi des ateliers et des guinguettes. Ces dernières disparaissent avec l’aménagement des années 1960-1970 ; qui prévoyait des grandes tours. Aujourd’hui, seules quelques rues comme celle de Mouzaïa témoignent de ce passé. Située au-dessus du parc des Buttes-Chaumont, cette rue (dont le nom provient du col de Mouzaia en Algérie où la France combattu en 1830) est un axe arboré qui dessert de minuscules ruelles, dont celle du hameau du Danube composé de vingt-huit maisons avec des jardinets construits en 1924, ressemblant à des cités-jardins.
Autour de Combat
Ce dernier quartier porte un nom qui semble associé à un conflit militaire, mais il n’en est rien. De 1781 à 1833 (date d’interdiction des affrontements de bêtes dans la capitale), des combats d’animaux, sanglants et spectaculaires, s’y déroulaient dans un cirque, mettant aux prises chiens et taureaux ou sangliers. Ce cirque de bois était situé juste à la frontière de la capitale, au niveau du mur des Fermiers généraux.
C’est à l’intérieur de ce quartier que le tristement fameux gibet de Montfaucon était installé, guettant les arrivées des condamnés à mort. En service jusqu’au xviie siècle, il n’a été démonté qu’après la Révolution française. La réputation du site des Buttes-Chaumont était alors sinistre. Le lieu est ensuite devenu une décharge insalubre et dangereuse puisqu’on venait y jeter les produits chimiques, les cadavres des animaux… Cela produisait des nuisances olfactives dans Tout-Paris, selon la direction des vents. Son nom disgracieux (provenant du latin Calvus Mons) semble provenir de l’infertilité de ses terrains. Ses sous-sols étant composés de gypse, de pierres meulières, de marnes et de glaise, cela empêchait la nature de s’y développer.
Avec l’exploitation des carrières, les environs sont peuplés de gens misérables, qui rôdent à la tombée de la nuit et viennent fouiller dans l’espoir d’y trouver quelque chose à manger. Sous le Second Empire, il est impératif de supprimer ce lieu qui devient un chantier clé des travaux de réaménagement de la capitale. Napoléon iii et le préfet Haussmann, sous l’influence des thèses hygiénistes (à la mode à l’époque) décident de le transformer en un grand jardin. Mais l’exploitation précédente a fragilisé les sous-sols, rendant inconstructible le site. Il est donc décidé de créer un immense espace vert de 25 ha. Le jardin, inspiré des parcs londoniens, est conçu comme un paysage de montagne, mêlant des grands dénivelés (comme des falaises) à des grottes et des cascades. C’est Adolphe Alphand qui dirige les travaux, lesquels s’achèveront en 1867, afin que l’inauguration coïncide avec l’ouverture de l’Exposition universelle. Le projet, qui débute en 1862, est un exploit paysager, architectural et mobilier. Mais aussi technique, par son système de circulation des eaux, et grâce au travail des terrassements et des nivellements…
À proximité du parc, sur une colline avoisinante, un minuscule quartier s’est développé : la butte Bergeyre, du nom du joueur de rugby décédé en 1914, Robert Bergeyre, alors âgé de 20 ans. Autrefois, il y avait des moulins et on y exploitait les carrières. Plus tard, dans son contrebas, la veuve du baron de Rothschild y fit construire une fondation ophtalmologique. Puis au début du xxe, s’y installèrent le parc d’attraction les Folles Buttes, un music-hall, un bal, un cinéma… On compte environ 1 200 résidents et, parmi ces derniers, quelques célébrités comme Clovis Cornillac ou Patrick Dupond.
Aujourd’hui, l’arrondissement des Buttes-Chaumont est devenu un quartier à la mode où les touristes se rendent en masse. L’été, pelouses, terrasses et quais se remplissent d’un public familial et populaire.
184 787 C’est le nombre d’habitants recensés en 2009. Il est en progression constante (on l’estimait à 76 445 en 1861), avec un taux de chômage relativement élevé puisqu’il avoisinait les 16,4% en 2013.
Un abattoir unique
Le 1er janvier 1867, les abattoirs de Grenelle, Ménilmontant, Montmartre, du Roule et de Villejuif sont remplacés par l'abattoir général de La Villette
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